au Musée Paul Valéry à Sète.
C’est toujours avec une réelle jubilation que je vais voir une exposition au musée Paul Valéry à Sète ( Hérault).
Ce musée est lumineux et les oeuvres exposées, quelles qu’elles soient, y pétillent!
Cet été, c’est une exposition très intrigante que vous allez pouvoir admirer: la collection d’art contemporain aborigène de Pierre Montagne.
70 oeuvres de 63 artistes sont accrochées au premier étage, ponctuées de panneaux informatifs clairs et très réussis.
Une importance particulière est accordée à un mouvement apparu dans les années 70, dans la communauté aborigène de Papunya, en Australie.
Mes nombreux séjours au Canada m’ont permis de voir quelques belles expositions d’art contemporain aborigène au Musée des Beaux-Arts d’Ottawa… Mais j’avoue mal connaître ces mouvements artistiques!
L’Art Aborigène est très mal connu également dans tout le sud de l’Europe, ce qui a présidé au choix du Musée de le faire connaître à travers cette exposition.
Qui sont les Aborigènes d’Australie ?
« Premiers hommes à avoir occupé le sol australien, les Aborigènes sont les autochtones de l’île-continent depuis au moins 40.000 ans.
Durant des millénaires, ces multiples tribus semi-nomades ont développé en autarcie une culture qui leur est propre, jusqu’au débarquement des colons occidentaux à la fin du XVIIIe siècle.
« A l’arrivée des colons anglais, les Aborigènes (…) se déplaçaient au sein de larges territoires, explique la spécialiste de l’Australie Maïa Ponsonnet1. Ils vivaient de chasse, de cueillette et de pêche en groupe d’une à quelques dizaines de familles. La fréquence de leurs déplacements et leur ampleur variaient selon les régions, car elles dépendaient largement des ressources en eau et en nourriture. »
Selon un recensement en 2011, il y aurait 670.000 indigènes en Australie, ce qui représenterait 3% de la population.
La culture aborigène
La tradition aborigène s’appuie sur une spiritualité liée à la terre, au paysage, la renvoyant à l’aube de la création du monde.
Beaucoup de groupes aborigènes estiment qu’au temps des origines la Terre a été le théâtre d’événements cosmologiques au cours desquels les ancêtres ont créé des paysages, les hommes, les divisions claniques, les rituels et la gestion foncière.
Selon les croyances des Aborigènes, rochers, collines, lacs portent l’empreinte laissée par les esprits créateurs. L’histoire de chaque ancêtre créateur s’inscrit dans un itinéraire géographique qui peut en croiser d’autres.
On traduit généralement cette philosophie religieuse par le « Temps du rêve ». Les cérémonies rituelles des aborigènes, chants, danses et peintures corporelles, maintiennent le lien entre le monde des vivants et celui des ancêtres : il s’agit de perpétuer les épisodes créateurs et les transmettre aux jeunes adultes.
Parmi les traits marquants de la culture aborigène, la peinture a une place importante qu’elle soit rupestre, sur sol, sur bois ou, plus récemment, sur tissus »
Extraits du site « terra australia » https://www.youtube.com/embed/VgfBmX5jbgc?feature=oembed
L’art aborigène contemporain porte une attention particulière à l’attachement au territoire, à sa lecture, à la préservation discrète des signes sacrés, camouflés derrière des points ou des pigments. Il a progressivement cédé la place à des œuvres innovantes. La grammaire picturale classique des rêves et représentations a progressivement offert de nouveaux terrains d’exploration et de créativité aux artistes grâce aux nouveaux supports (toile de lin, verre, bronze…) et matériaux (aquarelle, acrylique, film PVC pour protéger les pigments naturels des écorces peintes). L’époque contemporaine a favorisé la naissance d’individualité chez les artistes aborigènes. De nouveaux styles bien identifiables sont apparus. Contrairement au passé, à la lecture d’une toile il devient évident que celle-ci est l’œuvre de tel.le artiste ou de tel.le autre. Le marché de l’art mise sur ces individualités et invite les peintres à signer leurs créations.
Si l’art aborigène a permis de récupérer des terres hier, il s’avère aujourd’hui bien souvent comme un des seuls vecteurs naturels permettant aux jeunes générations de trouver une place dans la société. L’art fut hier un manifeste politique pour la reconnaissance des aborigènes, il devient presque aujourd’hui un passeport économique.
Dans l’exposition du Musée Paul Valéry, plusieurs communautés sont représentées: Terre d’Arnhem, regroupant 700 artistes, Désert central et occidental où nacquit l’art contemporain aborigène, l’Australie méridionale-Apy et l’Australie occidentale et Sud.
J’ai noté que la majorité des oeuvres présentées ont été réalisées par des femmes. Interrogée à ce sujet, Maïthé Vallès-Bled, Directrice du musée Paul Valéry et Conservateur en chef du Patrimoine, m’a expliqué que, chez les aborigènes, il n’existait pas de discrimination « sexiste » quant à l’accès à l’art, que ce soit au niveau de la création qu’au niveau de la diffusion.
Si vos déplacements de l’été vous mènent dans l’Hérault, ne manquez sous aucun prétexte cette très belle exposition, jusqu’au 26 septembre!
Au rez de chaussée du Musée, vous pourrez également voir :
» Retour au Musée avec Topolino », sympathique initiative d’un artiste sétois!