GERMAINE RICHIER À MONTPELLIER
C’est au film « Germaine Richier » écrit par Laurence Durieu et réalisé par Marthe Le More que j’emprunte le titre, tant il vrai que l’exposition présentée par le musée Fabre à Montpellier jusqu’au 5 novembre éclabousse les visiteurs de sa passion!
« Élevée à Castelnau-le-Lez, aux portes de Montpellier, issue d’une famille de minotiers et de viticulteurs, Germaine Richier est marquée dès le plus jeune âge par la nature sauvage et indisciplinée qui entoure son enfance, et les paysages arides de la garrigue. Languedocienne par sa mère et Provençale par son père, Richier grandit dans une propriété aux bords du Lez, dotée de grands platanes, dont elle regarde l’écorce noueuse, où grouille également une faune d’insectes qui nourrira ultérieurement sa pratique artistique.
(…) Entre 1921 et 1926, Richier se forme à l’École des beaux-arts de Montpellier, alors située dans le même édifice que le musée Fabre dont les salles sont mitoyennes. Elle étudie auprès du sculpteur Louis-Jacques Guigues, ancien élève d’Auguste Rodin, et directeur de l’école.
Installée à Paris à partir de l’année 1926, où elle se forme auprès d’Antoine Bourdelle, Richier n’aura en effet de cesse de s’inspirer de sa Provence natale où elle se rend régulièrement.
(…) Dès les années 1930, elle est sollicitée pour orner le pavillon Languedoc Méditerranéen lors de l’exposition universelle de Paris en 1937, autour du thème de l’influence de la mer. Elle réalise à cette occasion une allégorie de la Méditerranée, incarnée par une femme nue qui porte la coiffe de l’Arlésienne.
(…) Le bestiaire de Germaine Richier n’aura en outre de cesse de puiser ses sources dans la faune méridionale, qu’il s’agisse de La Sauterelle, La Cigale, mais également La Mante, insecte qu’elle découvre durant sa jeunesse montpelliéraine. D’un point de vue matériel, Richier travaille par ailleurs à l’incorporation d’éléments naturels dans le plâtre au moment du modelage, des essences de bois flotté et de branchages, envoyés par sa famille depuis les côtes méditerranéennes. »
Extrait de la présentation de Maud Marron-Wojewodzki, conservatrice du patrimoine et commissaire de l’exposition)
À travers cette remarquable rétrospective de 200 oeuvres, réalisée en collaboration avec le Centre Pompidou, nous allons faire la connaissance d’une artiste vibrante, peu connue du grand public, et qui fut la première femme exposée de son vivant au musée National d’Art Moderne en 1956…
Elle a créé un univers peuplé de personnages étranges, parfois brutaux, qui nous attrapent pour nous immerger dans son imaginaire et le contraste est saisissant entre le visage doux et lumineux de l’artiste et ses créatures!
Le parcours de l’exposition nous emmène rencontrer Germaine Richier autour de plusieurs thématiques qui illustrent la richesse de son oeuvre et les différentes traversées de son inspiration: sculptures d’après modèles vivants, puis son évolution vers des représentations plus abruptes et plus violentes pendant les années de guerre et son exil, les « hybridations », sortes de personnages mi-humains, mi animaux ou végétaux, les mythes et symboles comme le fameux Christ qui fit scandale, les « sculptures à fil » et, enfin, des expérimentations autour des matériaux et de l’abstraction.
Même s’il est difficile de classer Germaine Richier, elle me fait un peu penser à Giacometti par l’aspect filiforme de certaines oeuvres et la force brute qui s’en dégage.
LE « SCANDALE » DU CHRIST D’ASSY
Son rapport aux mythes et aux symboles s’exprimera pleinement dans la commande publique en 1950 d’un Christ pour l’église Notre-Dame-de-Toute-Grâce à Assy.
Ce Christ longiligne, au visage gommé et le corps blessé, suscite la colère et l’indignation de groupes catholiques traditionalistes et déclenche « la querelle de l’art sacré ».
Retiré du maître-hôtel en 1951, il n’y sera replacé que dix ans après la mort de Richier, en 1969.
« Notre époque, au fond, est pleine de griffes. Les gens sont hérissés comme après les guerres. Pour moi, dans les œuvres violentes, il y a autant de sensibilité que dans les œuvres poétiques. Il peut y avoir autant de sagesse dans la violence que dans la douceur. » Germaine Richier
C’est curieux de se rappeler qu’en 1994, Pierre Soulages fit scandale en présentant ses vitraux de l’abbaye de Conques…
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À MONTPELLIER BIENTÔT…
La Ville de Montpellier annonce qu’elle va installer un nouveau tirage d’une oeuvre de la sculptrice Germaine Richier, La Spirale. Cette oeuvre prendra place en 2025 sur l’esplanade Charles-de-Gaulle, en Centre Ville de Montpellier, transformée et végétalisée dans le cadre de son réaménagement urbain.
Pour concrétiser ce projet, et depuis le lancement de l’exposition, le musée Fabre propose aux entreprises comme aux particuliers de participer à l’acquisition de cette nouvelle oeuvre bientôt accessible et visible de tous, sous forme de souscription publique, d’un partenariat ou sous la forme d’un mécénat personnalisé.
Plusieurs rendez-vous vous sont présentés autour de l’exposition: visite poétique, sortie atelier fonte et bronze, spectacle de danse, conférences etc.
Dans l’exposition même vous pourrez donc voir le film « Germaine Richier », et un salon vous propose l’écoute d’une dizaine de lettres écrites par l’artiste à sa famille, à certains de ses élèves, à son mari Otto Bänninger… Passionnant et émouvant partage de son regard sur l’Art !