N’EFFAÇONS PAS LEURS TRACES!

« Préhistomania » au Musée de l’Homme à Paris, jusqu’au 20 mai.

Une exposition temporaire consacrée aux relevés d’art rupestre et pariétal, en partenariat avec l’Institut Frobenius pour la recherche en anthropologie culturelle (Francfort-sur-le-Main).

Entrée de l’exposition « Préhistomania »

Après les expositions « Arts et Préhistoire »  (cf: « L’Art d’être curieux » 11/02/2023) et « Picasso et la Préhistoire », l’exposition « Préhistomania » nous emmène au cœur d’une aventure humaine.

Carte des sites de l’Art rupestre


40000 ans nous séparent de nos lointains ancêtres, ces hommes et ces femmes qui ont réalisé des chefs-d’œuvre, peints ou gravés sur les parois des grottes, et que nous pouvons encore admirer aujourd’hui parce que, plusieurs millénaires plus tard, d’autres hommes et d’autres femmes ont décidé de sauvegarder ce patrimoine de l’humanité.
« Partout, les peintures rupestres représentent une ressource non renouvelable et en danger. Elles posent la question du poids culturel de ce patrimoine qui ne cesse d’attirer et d’inspirer.
Dans cette histoire, le relevé est parfois le dernier témoin de sites endommagés, voire disparus.
Un objet hybride entre l’œuvre, l’archive et le document scientifique, dont l’héritage demeure palpable dans le champ artistique contemporain. »
Avec plus de 200 documents et objets, dont une soixantaine de relevés originaux, l’exposition offre un panorama mondial de ces œuvres, raconte les aventures que furent les expéditions, montre quelle source d’inspiration les relevés devinrent pour les artistes du XXe siècle, et documente les techniques actuelles de transposition et de conservation des peintures rupestres et pariétales. »

(Extrait du Dossier de presse – Aurélie Clemente-Ruiz, directrice du Musée de l’Homme)

Agnès Schulz, la première dessinatrice à avoir travaillé avec Léo Frobenius, en 1923

À l’entrée de l’exposition, nous sommes accueilli.es par une magnifique et étonnante photo de cette jeune femme dans un décor inhabituel pour une exposition sur la préhistoire !
« Nous voulons que le visiteur éprouve le même choc esthétique qu’ont eu les découvreurs des premiers sites préhistoriques » (Aurélie Clemente-Ruiz, directrice du Musée de l’Homme.)
Et c’est réussi ! Il suffit de quelques pas pour oublier la lumière naturelle de l’espace d’accueil et pour avoir la sensation d’entrer dans une grotte dès que nous arrivons dans la première salle.
Nous sommes alors transporté.es dans le temps et dans l’espace à travers l’Afrique australe, le Tchad, l’Afrique du Nord, la Papouasie, l’Europe…

Présentation de l’exposition par Egidia Souto, commissaire de l’exposition « Préhistomania », maîtresse de conférences à l’université où elle enseigne le Patrimoine, la Littérature et l’Histoire de l’Art de l’Afrique:

Première salle

PREMIÈRE SALLE:

Nous nous retrouvons en tête-à-tête avec les répliques originales des oeuvres millénaires ornant les grottes et abris sous roche d’Afrique du Sud, du Tchad, de Papouasie-Nouvelle Guinée…
Plongé.es dans la pénombre, nous sommes happé.es par d’immenses papiers peints de formes abstraites, géométriques ou oniriques, représentant des humains, des animaux ou des végétaux dans des compositions harmonieuses aux couleurs flamboyantes.
C’est à la fois troublant, émouvant, saisissant !

« Grands éléphants, animaux et hommes peints ».
Relevé de J. Lutz au Zimbabwe en 1929
© Institut Frobenius, Francfort-sur-le Main »
Zoom sur une partie du tableau – les personnages

SECONDE SALLE: LA FABRIQUE DES RELEVÈS:

Ces relevés ont été réalisés dès le début du XXe siècle lors d’expéditions internationales dont celles de l’allemand Léo Frobenius (1873-1938), celles du français Henri Breuil (1877-1961), celles de Gérard Bailloud (1919-2010) et de Henri Lhote (1903-1991). Ces derniers ont ainsi contribué aux débuts de l’étude de la Préhistoire à l’échelle mondiale.

  • Léo Frobenius :
Portrait de Leo Frobenius par son frère ainé, Hermann Frobenius, en 1924.
© Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main

L’ethnologue allemand passionné d’Afrique, Léo Frobenius, a parcouru le monde accompagné d’équipes d’artistes, essentiellement féminines, toutes diplômées d’écoles d’art.
La plupart des sites étant difficiles d’accès, ces femmes « ont dû trouver des moyens de copier dans des conditions pas idéales, dans des climats souvent secs où les peintures séchaient très vite« , (Egidia Souto, maître de conférence en histoire de l’art de l’Afrique à l’Université Sorbonne Nouvelle et commissaire de l’exposition)

.

Photos d’expéditions:

Relevé 2 girafes et 1 éléphant
  • L’Abbé Henri Breuil (connu pour avoir mis à jour la grotte de Lascaux):
    Ordonné prêtre en 1900, il demande à ne pas être rattaché à une paroisse afin de pouvoir se consacrer à la science. Surnommé le « Pape de la Préhistoire », il fut un pionnier en la matière.
    Dès 1901, il réalise des relevés de deux grottes ornées majeures en Dordogne, celles de Combarelles et Font-de-Gaume, qu’il publie.
    Dès lors, il découvre des sites similaires à travers la France, participe à l’étude de nombreux autres sites dans le monde et fonde la base de cette science de la Préhistoire, ce qui fait de lui un spécialiste international de l’art pariétal. Il a passé des centaines de journée sous terre à réaliser des milliers de relevés. L’exposition en présente dix qui n’étaient jamais encore sortis des collections.
« Très sollicité, H. Breuil réalise lui-même une partie des relevés par calque direct, sur site, puis emporte avec lui un certain nombre de notes afin de poursuivre son travail plus tard. Mû par un souci d’exactitude,
il a pour principal objectif la publication scientifique.»
Relevés d’Henri Breuil.
« Le petit cheval rouge »
  • Henri Lhote :
    Autodidacte né avec le XXe siècle, Henri Lhote est l’explorateur à qui l’on doit les fascinantes images du Sahara vert de l’époque Néolithique, peuplé de girafes, d’éléphants, d’humains chassant ou conduisant des troupeaux. Elles témoignent des débuts de l’élevage et d’un climat radicalement différent de celui que connaît aujourd’hui l’Afrique du Nord. Plus d’un millier des relevés d’Henri Lhote sont conservés au Musée de l’Homme.

Les relevés d’Henri Lhote figurent parmi les trésors des collections du Musée de l’Homme. Certains d’entre eux y sont exposés en rotation, c’est-à-dire sur de courtes durées pour optimiser leur conservation. L’exposition donne l’occasion rare d’en admirer une douzaine, et de comprendre le contexte de leur création.

Ce tableau qui représente un être hybride étonnant, démesuré par rapport aux personnages et animaux qui l’entourent, affublé de cornes et levant les bras ,a été restauré pour l’occasion au Musée de l’Homme durant l’été 2023.

Gérard Bailloud,  préhistorien discret :

Gérard Bailloud

Albert Hahn:

TROISIÈME SALLE ET DERNIÈRE SALLE:

Dans un troisième temps, le parcours s’intéresse à la présentation des relevés, dans les musées, dans de grandes expositions, comme à Paris en 1930, au MoMA à New York en 1937…
Ces relevés inspireront de grands artistes tels que Klee, Pollock, Arp et Lam, dont des œuvres sont présentées en regard.


« Les boeufs à points » Pierre Colombel. Gouache sur papier. (c) Musée de l’Homme. Collection Lhote

La dernière salle nous fait découvrir quelles méthodes sont employées aujourd’hui pour décrypter les figures rupestres et en conserver toutes les informations.
Aujourd’hui encore, l’œil et la main restent les premiers outils des archéologues, qui réalisent des croquis de lecture… Avant de s’appuyer sur de la photographie 3D, des techniques (et des spécialités) de plus en plus élaborées.
Ces anciens « tableaux » scientifiques, œuvres longtemps mises de côté, sortent de plus en plus des placards dans lesquelles elles ont été placées, notamment, ceux de l’Institut Frobenius pour la recherche en anthropologie culturelle de Francfort-sur-le-Main (Allemagne).

Pour prolonger la visite:

https://www.parismatch.com/culture/art/prehistomania-plongee-dans-la-prehistoire-les-grandes-expeditions-1er-episode-232220

https://www.parismatch.com/culture/art/prehistomania-plongee-dans-la-prehistoire-ils-remontent-le-temps-de-notre-histoire-2eme-episode-232467

https://www.parismatch.com/culture/art/prehistomania-plongee-dans-la-prehistoire-les-tresors-de-la-prehistoire-3eme-episode-232701

RÉDACTION ET PHOTOS: KADIA RACHEDI

« Préhistomania » se trouve au Musée de l’Homme,
17 place du Trocadéro à Paris.

Tous les jours, sauf les mardis de 11h à 19 h.

Tags: No tags