Depuis mi-septembre et jusqu’à fin janvier 2026, le musée Jacquemart-André à Paris nous entraîne dans l’univers envoutant de Georges de la Tour. C’est la première exposition consacrée à l’artiste en France depuis celle du Grand Palais en 1997. Ce sont 30 tableaux et oeuvres graphiques venus de tous les coins du Monde ( Allemagne, Japon, USA, Italie, Portugal, Suède, Ukraine…. ) et d’environ vingt musées français, qui permettent une approche thématique destinée à cerner l’originalité de Georges de La Tour. Le parcours explore ses sujets de prédilections : scènes de genre, figures de saints pénitents, effets de lumière artificielle… Tout en replaçant sa vie et son œuvre dans le contexte plus large du « caravagisme » européen, notamment celui de l’influence des caravagesques français, lorrains et hollandais. (« Le caravagisme est un courant pictural de la première moitié du XVIIe siècle, qui tire son nom du peintre italien Caravage – 1571-1610- caractérisé par la prédominance de scènes aux puissants contrastes de lumière et d’ombre transcendées par la maîtrise virtuose du clair-obscur. » Source : Wikipédia)
Le Caravage : « Saint Jérôme »
Le Caravage : « Les tricheurs »
ENTRE OMBRE ET LUMIÈRE…
Né en 1593, à la limite du Moyen-Age et de la Renaissance, Georges de la Tour fut très connu de son vivant (à tel point que nombre de ses tableaux furent copiés…). Puis il tombe dans l’oubli avant d’être re-découvert au début du XXe siècle. Il prend alors une place importante dans l’Histoire de l’Art, car les historien.ne.s de l’Art sont faciné.e.s par sa façon d’utiliser la lumière artificielle des bougies, au lieu de la lumière du jour. Cet éclairage rend les traits des visages à la fois nets et doux, empreints d’une gravité et d’une beauté étonnantes, qui attirent l’oeil comme un gros plan ! En peignant des femmes et des hommes du peuple, des vieillards, des saints ou des gueux, Georges de la Tour semble vouloir nous prouver que seule la spiritualité unirait les êtres humains.
Lors de l’exposition « Caravage et le Caravagisme » au musée Fabre de Montpellier en 2012, dans laquelle étaient exposés des tableaux de Georges de la Tour, j’avais proposé à des étudiants issus des quartiers dits « sensibles » de Montpellier de visiter l’exposition, les laissant libres d’aimer ou pas, de rester ou de partir… Et rendez-vous pris deux heures plus tard dans le hall… Et là je vois arriver le jeune Illiès, qui se précipite vers moi : » Madame.. J’ai vu la plus belle chose au monde ! » :
Georges de La Tour : « Le nouveau né » vers 1647.
La semaine dernière, au musée Jacquemart-André, devant ce tableau que je pouvais revoir « en vrai », l’émotion de ce moment m’est revenue, car Illiès avait raison : la simplicité du trait, les couleurs, l’éclairage presque vacillant de la bougie qui se pose sur le visage du nouveau-né et le regard de la femme qui le tient, inondent le spectateur de sérénité et de calme ! Ce tableau illustre bien comment Georges de la Tour transforme une scène domestique par la seule force de la lumière : il semblerait que la lumière émane du nourrisson… Peut-on y lire une allusion à la Vierge et à l’enfant Jésus ?
Des tableaux iconiques…
Même si les historiens estiment à – seulement – une quarantaine d’originaux l’oeuvre de De la Tour, ses tableaux nous sont familiers, tant ils ont illustrés nos livres d’histoire ou de littérature française…
Dès les années 1610, le style de Caravage s’est diffusé dans toute l’Europe, porté par les voyages des artistes et la circulation des œuvres, et s’est adapté aux traditions locales. Rien ne prouve que Georges de La Tour se soit rendu en Italie, mais il assimile avec une grande liberté ce langage nouveau : le clair-obscur, pour le transformer en un langage personnel épuré. (Le « clair-obscur« , dans une peinture est le contraste entre des zones claires et des zones sombres. Dans une œuvre figurative, il suggère le relief par l’effet de la lumière sur les volumes. On dit qu’un tableau est « en clair-obscur » quand ce contraste est important.)
« La fillette au brasero » vers 1640.
« Le souffleur à la pipe » 1646. Celui-ci est la version originale, connue par huit copies…
« Les joueurs de dés » vers 1640-1652.
« Les larmes de Saint Pierre ». 1645.
« Saint Grégoire » de G.de la Tour ou d’après ? Vers 1630.
Deux versions de « St Jérôme pénitent » destinés à deux commanditaires différents… On y retrouve les traits du St Jérôme de Caravage…
« La femme à la puce » 1632-1635
« La Madeleine pénitente »
L’art du détail
Si l’on peut regretter l’exiguité des salles du musée Jacquemart-André, surtout lorsqu’elles sont bondées – mais allons nous regretter qu’il y ait du monde dans les musées ? 🙂 – cette promiscuité un peu forcée avec les oeuvres nous fait découvrir les subtilités des détails auxquels s’attache particulièrement l’artiste ! Regards, gestes, mains actives ou posées, larmes, bougies… Deviennent alors des protagonistes indispensables à la compréhension de l’oeuvre de Georges de la Tour.
Détail de « Le nouveau-né »
Détail de « Le nouveau-né »
Détail de « Job raillé par sa femme »
Détail « La Madeleine pénitente »
Détail : « Le reniement de Saint Pierre »
Détail de « Les larmes de St Pierre »
Détail de « Les joueurs de dés »
Détail de « Le vieillard au chien »
Vers la fin de sa vie, alors que le caravagisme avait presque disparu, Georges de La Tour en conserva l’austérité, mais dans un esprit assez différent. Plus qu’un peintre de la nuit, de La Tour est un peintre de la flamme, une flamme qui révèle, transfigure, et donne à la scène la plus humble une évidente dimension religieuse. Georges de la Tour meurt en 1652, à Lunéville, emporté par une épidémie à l’âge de 59 ans.
Le Musée Jacquemard-André se trouve 158 bd Haussmann 75008 PARIS
3° PARTIE : L’EXPOSITION « NIKI de SAINT PHALLE » CENTRE POMPIDOU, PARIS, 1980.
« Pour cette exposition l’artiste sélectionne des œuvres de toutes ses séries pour un parcours qui n’est pas strictement chronologique. La rétrospective met également en valeur la dimension architecturale et monumentale de plusieurs projets de Saint Phalle, achevés ou en cours, à travers photographies, dessins et maquettes »… Sophie Duplaix, Conservatrice en chef des collections contemporaines Musée national d’art moderne – Centre Pompidou (Extrait du dossier de presse)
Affiche de l’exposition Niki de St Phalle à Pompidou, 1980.
« L’affiche de l’exposition, sans concession, présente le dessin coloré d’une femme en porte-jarretelles, dans toute sa féminité. Des nombreuses sculptures auxquelles elle fait écho jusqu’aux Tableaux-tirs dégoulinant de peinture et suggérant une violence traditionnellement associée à la virilité, l’exposition dérange. Ou, plutôt, elle convie un public ouvert, dont la mentalité peut évoluer notamment grâce à l’art donné à voir en ce lieu innovant qu’est le Centre Pompidou, placé sous le signe de la haute technologie, de la couleur et de la modularité. » (Extrait du dossier de presse).
Niki de Saint Phalle.
« Française de naissance, naturalisée Américaine, puis Suisse, Italienne de cœur. Comme elle aime à se décrire, Niki de Saint Phalle est une citoyenne du monde ». Née en 1930 à Neuilly-sur-Seine et décédée en 2002 à San Diegoen Californie, Niki de Saint Phalle, de son vrai nom Catherine Marie-Agnès Fal de Saint Phalle, a grandi entre deux cultures. Issue d’une famille de la noblesse française par son père, elle passe son enfance entre la France et les Etats-Unis, le pays de sa mère Jeanne Jacqueline Harper. Niki de Saint Phalle a d’abord été mannequin avant d’aborder l’art en autodidacte. A 18 ans, elle épouse Harry Matthiews, avec qui elle aura deux enfants. Elle n’a suivi aucun enseignement artistique académique mais s’est nourrie d’abondants échanges artistiques avec ses aînés et contemporains. S’inspirant de plusieurs courants : art brut, art outsider, elle a commencé à peindre en 1952. En 1961, elle est la seule femme membre du groupe des « Nouveaux Réalistes » fondé par Yves Klein et Pierre Restany.
En 1953, victime d’une grave dépression nerveuse, elle est soignée en hôpital psychiatrique et les électrochocs qu’elle y reçoit altèrent sa mémoire. « J’ai commencé à peindre chez les fous… J’y ai découvert l’univers sombre de la folie et sa guérison, j’y ai appris à traduire en peinture mes sentiments, les peurs, la violence, l’espoir et la joie. » Vers 1955, elle voyage en Espagne avec son mari et découvre les jardins de Gaudi dont elle s’inspirera à partir de 1978 et jusqu’à la fin de sa vie pour entreprendre ce qui sera son grand œuvre : « Le Jardin des Tarots », situé en Toscane. Elle s’éteint à l’âge de 71 ans le 21 mai 2002 à San Diego, en Californie.
À Paris, où elle trouve son inspiration au Musée d’Art Moderne, elle rencontre Jean Tinguely qu’elle épousera en 1971, après avoir divorcé de Harry Matthews. Pendant longtemps, Niki de Saint Phalle cache un lourd secret, le viol par son père à l’âge de onze ans, qu’elle révèle dans son livre « Mon secret », initialement publié aux éditions de la Différence en 1994. Epuisé, il vient d’être réédité en mai 2023 par Les Editions des femmes–Antoinette Fouque et Le Rayon Blanc. C’est un témoignage poignant sur l’inceste. Dans ce court récit (40 pages) écrit à la main, c’est la parole intime de l’une des plus grandes artistes plasticiennes du XXe siècle et «le cri désespéré de la petite fille» qui s’expriment. À l’âge de 64 ans, l’artiste entame ce texte rédigé sous forme de lettre adressée à sa fille Laura. Elle y raconte l’indicible avec des mots simples et poignants. « J’ai écrit ce livre d’abord pour moi-même, pour tenter de me délivrer enfin de ce drame qui a joué un rôle si déterminant dans ma vie. Je suis une rescapée de la mort, j’avais besoin de laisser la petite fille en moi parler enfin. Mon texte est le cri désespéré de la petite fille ». Niki de Saint Phalle.
Le livre « Mon secret » 1994
Portrait d’une artiste libre et flamboyante, une des figures les plus marquantes du XXe siècle.
À la fois plasticienne, peintre, sculptrice, réalisatrice et pionnière en matière de performance artistique, Niki de Saint Phalle fait partie au début des années 1960 des premières artistes femmes à acquérir la célébrité de son vivant. Avec son imaginaire et ses créations monumentales, percutantes, colorées et politiques, Niki de Saint Phalle a marqué l’histoire de l’art. Dans les années 1960, l’artiste invente les “Tirs”, des œuvres explosives où la peinture jaillit sous l’impact des balles. Des performances spectaculaires, libératrices, et aujourd’hui emblématiques.
« Faire saigner la peinture » Des œuvres-performances…
“« … En tirant sur moi, je tirais sur la société et ses injustices. En tirant sur ma propre violence, je tirais sur la violence du temps ». Niki de Saint Phalle.
Niki de Saint Phalle a commencé ses « Tirs » en 1960 avec des fléchettes sur des tableaux-cibles. Dans ces silhouettes, on peut reconnaître celle du père haï, qui l’a violée à l’âge de onze ans. À partir de 1961, dans la série « Les Tirs » qui vont suivre, Niki laisse éclater sa rage contre « Papa, tous les hommes, les petits, les grands, mon frère, la société, l’église, le couvent, l’école, ma famille, ma mère, moi-même (…). Après avoir « tiré tous azimuts », elle déclare : « Victime ! Prêt ! À vos marques ! Feu! Rouge ! Bleu ! Jaune ! La peinture pleure, la peinture est morte. J’ai tué la peinture. Elle est ressuscitée. Guerre sans victime ! » Niki est en révolte contre le monde qui a généré des guerres, des massacres, le bombardement atomique d’Hiroshima, la guerre d’Algérie, contre «un monde secoué de convulsions violentes». Elle confectionne, à la main, des tableaux-reliefs recouverts de plâtre dans lesquels elle inclut des poches de peinture, des bombes de couleur et même des produits alimentaires comme des œufs. Devant un public médusé, l’artiste vise à la carabine ses tableaux-reliefs. À chaque coup de feu, les sachets éclatent, libérant des flots de couleurs. Les “tableaux-tirs” dégoulinent alors de peinture, transformant la toile en champ de bataille et renversant les codes de la peinture traditionnelle.
Niki de Saint Phalle : séance de Tirs dans une cour à Stockholm 14 mai 1961 (crédit Lennart Olson)
Niki de Saint Phalle : séances de Tirs Impasse Ronsin 26 juin 1961
Niki de Saint Phalle : séances de Tirs 26 juin 1961…
… Exposition « Feu à volonté » Galerie J, Paris
L’aspect spectaculaire de son travail fait d’elle l’une des membres les plus médiatiques du mouvement du « Nouveau Réalisme ». Elle invite des amateurs à tirer sur la toile, au hasard. L’œuvre trouve alors sa forme définitive, sous l’impulsion du public, pour exprimer la violence de la société. En s’emparant d’une carabine pour tirer sur ses compositions et « faire saigner » sa peinture, l’artiste bouleverse le monde de l’art. Si les Tirs sont aujourd’hui des performances iconiques de l’artiste qui lui ont permis de s’affirmer au sein de la scène artistique, la série fut très critiquée pour sa violence qui suggère une appropriation d’un comportement assigné au genre masculin. Par ce geste, elle retourne la violence contre le cadre même de la peinture et de l’ordre établi. « L’histoire, la religion, la politique : Niki de Saint Phalle a tiré sur tout ! » Le Tableau-relief King Kong en est l’illustration :
Niki de Saint Phalle : « King-Kong », 1963
Ce monumental Tableau-tir, l’un des plus ambitieux de Niki de Saint Phalle, est directement inspiré des films sur King Kong que l’artiste, férue de cinéma fantastique, a vus. Sous la forme d’un dinosaure, le monstre s’apprête à détruire tout un quartier d’une ville, tandis que des masques à l’effigie des tenants de la guerre froide viennent rappeler le contexte de cette possible fiction, à laquelle se mêlent de façon incongrue d’autres visages issus de la culture populaire. Réalisée pour la Dwan Gallery de Los Angelès, l’œuvre, avec ses études, reste pendant des années dans les réserves jusqu’à ce que Pontus Hulten en sollicite le don pour Moderna Museet, à charge pour lui de rapatrier l’ensemble à Stockholm.
Niki de Saint Phalle a fait de son art le lieu de nombreux combats.
Femme artiste engagée et militante elle ne fait aucun compromis. Elle soutient la libération et l’émancipation des femmes, la cause des Noir.es américain.es, celle des malades atteints du sida…
Le combat contre la religion et contre la guerre et les peuples colonisés :
L’émancipation des femmes en particulier est au cœur de son travail :
Après « Les Tirs », Niki de Saint Phalle entame une nouvelle série qui met en scène les stéréotypes féminins à travers des sculptures-reliefs particulièrement troublantes. À une époque où l’art reste largement dominé par les hommes, Niki de Saint Phalle impose sa voix. Aujourd’hui encore, les éclats de couleurs continuent de résonner comme autant de coups de feu contre les injustices et les carcans.
Le thème de la mariée apparaît en 1963 au sein d’un nouvel ensemble de sculptures dédié à la condition féminine, en y jetant un regard acerbe et profondément dérangeant. Si l’artiste est devenue, très jeune, épouse et mère, elle s’est toujours insurgée contre la soumission des femmes à leur conjoint et aux divers rôles que la société leur assignait alors. La figure de « La Mariée », par sa posture légèrement courbée, ses yeux hagards et la constellation de petits jouets dérisoires figés dans son buste, incarne la souffrance de la femme prisonnière des conventions sociales :
Niki de Saint Phalle : « La Mariée », 1963 (autre titre Eva Maria).
« Accouchement rose » est une sculpture-relief qui dénonce l’assignation pour les femmes à être essentiellement dans la fonction reproductive :
Niki de Saint Phalle : « Accouchement rose », 1964
Dans la déclinaison des rôles féminins auxquels l’artiste s’attaque avec violence, cette « Crucifixion« , est la plus iconoclaste. Présentée au mur tel le martyr auquel le titre fait allusion, cette femme sans bras, dont la tête est ornée de bigoudis, dénonce sans détours l’absurdité d’une condition qu’il est temps de dépasser :
Niki de Saint Phalle : « Crucifixion », vers 1965 (autre titre : Leto)
Les Nanas
À partir du milieu des années 1960, Niki de Saint Phalle peuple le monde de Nanas, ces figures féminines colorées aux courbes généreuses. À une époque où les femmes sont encore largement limitées dans leurs aspirations, les Nanas, optimistes, actives, représentent un imaginaire libérateur. Monumentales, colorées, elles affirment leur présence, leur émancipation et leur pouvoir. Les Nanas portent des prénoms qui sont souvent ceux des proches de l’artiste… Elles s’appellent Louise, Elisabeth, Nana, Black Rosy…
Niki de Saint Phalle : « Les Nanas »
Niki de Saint Phalle : « Les Nanas »
C’est le corps de sa sœur Elisabeth enceint qu’évoque ici cette Nana aux formes généreuses qui fait écho aux rondeurs et aux coloris de la gigantesque déesse-mère de l’exposition de Stockholm, « Hon/Elle – en katedral » 1966 » (voir l’article sur l’Art d’être Curieux, de la première partie) :
Niki de Saint Phalle « Elisabeth », 1965
Le combat contre le racisme et les discriminations :
L’œuvre de Niki de Saint Phalle est par essence une œuvre de tolérance. Ayant grandi en partie aux États-Unis alors que la ségrégation raciale était encore en cours, l’artiste est très tôt sensible à la cause des Afro-Américains. Trouvant les personnalités noires insuffisamment reconnues, elle leur consacre en 1998 une série de sculptures.
En hommage aux héroïnes de la condition noire qu’elle a toujours défendues, Black Rosy, l’une de ses premières Nanas noires, renvoie à la militante Rosa Parks, magnifiée par sa taille, ses formes généreuses, son haut bigarré et sa jupe garnie de cœurs roses :
Niki de Saint Phalle : « Black Rosy » ou « My Heart Belongs to Rosy », 1965 (Rosy noire ou mon cœur appartient à Rosy)
Niki de Saint Phalle, L’atelier de l’artiste – extraits d’une interview réalisée en 1969
Des personnages qui dérangent
Après les Nanas épanouies et joyeuses, Niki de Saint Phalle qui ne veut pas laisser son travail se réduire à cette série très populaire, entame un ensemble d’œuvres particulièrement dérangeantes : « Les Mères dévorantes ». Elles sont difformes, à l’image qu’elle se fait de sa propre mère, non pas sur le plan physique mais moral et psychologique.
Niki de Saint Phalle : « La Promenade du dimanche », 1971 Dans « La Promenade du dimanche », un couple – qui pourrait être celui de ses parents – tient en laisse une araignée géante. La femme laide et énorme semble écraser l’homme chétif, leurs regards hébétés inspirant tant le rire que l’effroi.
Niki de Saint Phalle : « L’Aveugle dans la prairie », 1974 « Si l’homme est aveugle, c’est sans doute parce qu’il ne voit pas la vache joyeusement bariolée, bien plus intéressante que son terne journal. »
Niki de Saint Phalle et Jean Tinguely : une histoire d’amour et d’amitié artistique ininterrompue
En 1971, Niki de Saint Phalle réalise un livre, un « leporello », qui se présente sous la forme d’un soufflet que l’on déplie comme un accordéon. En quelque sorte, un livre qui s’anime :
Hommage à Jean Tinguely
À partir de 1985, la santé de Jean Tinguely se dégrade et il doit être hospitalisé à plusieurs reprises. Il décède le 30 août 1991 à Berne. En 1992 Niki de Saint Phalle va lui rendre un vibrant hommage qui prend la forme de « Tableaux éclatés » qu’elle conçoit juste après son décès. Les tous premiers qui préfigurent la série, plus sommaires dans leur fabrication, sont explicitement dédiés à «Jean». Ce sont de petits éléments qui tournent sur eux-mêmes. « Les Tableaux éclatés » sont animés d’un « éclatement » des différentes parties qui s’ouvrent et se referment dans un mouvement plutôt lent, mesuré. Des capteurs photosensibles déclenchent l’éclatement du tableau.
Niki de Saint Phalle : histoires de famille : « Elle était très blagueuse ». Bloum Cardenas et Laura Gabriela-Duke, respectivement petite-fille et fille de Niki de Saint Phalle, livrent quelques souvenirs émouvants d’une femme hors du commun.
La Fontaine Stravinsky, appelée aussi Fontaine des automates a été aménagée en 1983 devant le Centre Pompidou. Elle s’inscrit dans le programme de création de « sculptures fontaines ». Jacques Chirac, maire de l’époque, confia la création de la plus importante des douze fontaines prévues dans ce cadre à Niki de Saint-Phalle et à Jean Tinguely. La fontaine est composée de 16 sculptures : 7 mobiles de Jean Tinguely, 6 figures en résine colorée de Niki de Saint-Phalle et 3 sculptures réalisées conjointement. Ces œuvres d’art ont été imaginées sur le thème du ballet du Sacre du Printemps, et rendent hommage au compositeur Igor Stravinsky dont la place porte le nom. Les sculptures évoquent, par leurs mouvements et les sons qu’elles émettent, la musique du compositeur russe. Chacune d’entre elles porte un titre qui se rapporte de près ou de loin à une œuvre de Stravinsky : La Sirène, Ragtime, Le chapeau de clown, Le Renard, Le Cœur, La Diagonale, L’Éléphant, La Vie, Le Rossignol, Le Serpent, La Mort, L’Oiseau de Feu, La Clé de Sol, L’Amour, La Spirale et La Grenouille.
En 1993, sa santé fragile amène Niki de Saint Phalle à s’installer en Californie aux Etats Unis. Jusqu’à sa mort en 2002, elle reste en contact avec Pontus Hulten qui décède à son tour en 2006.
… Écoutons « Gulliverte » par Anne Sylvestre :
Anne Sylvestre.
L’EXPOSITION : « NIKI DE SAINT PHALLE JEAN TINGUELY PONTUS HULTEN »
que nous vous avons présentée en trois parties, se trouve au Grand Palais à Paris jusqu’au 4 janvier 2026
2° PARTIE : L’EXPOSITION « TINGUELY », CENTRE POMPIDOU, PARIS, 1988-1989
Initialement à la tête du musée d’art moderne de Stockholm, Pontus Hulten qui fut le premier directeur du Centre Georges-Pompidou de 1977 à 1981, est rappelé en 1988 comme conseiller de la présidence du Centre Pompidou.
Il fait alors venir à Paris l’exposition rétrospective de Jean Tinguely qu’il a élaborée l’année précédente à Venise où il était directeur artistique du Palazzo Grassi.
Portrait de Jean Tinguely : « Anarchiste, anti-consumériste et roi de la récup… » Jean Tinguely est un sculpteur suisse, né en 1925 à Fribourg et mort à Berne en 1991.
Enfant, Jean Tinguely crée, dans la forêt, au bord du ruisseau, une vingtaine de moulins hydrauliques et sonores, faits de roues de bois et de boîtes de conserves heurtées. Ces réalisations éphémères révèlent déjà son intérêt pour la construction, les matériaux pauvres, la roue, le temps, le mouvement, la vitesse et le son. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, il fait un apprentissage de décorateur/étalagiste puis suit des cours à l’Ecole des Arts appliqués de Bâle où il découvre l’Art contemporain et en particulier l’Art abstrait, le Dadaïsme, le Bauhaus et le Constructivisme russe. C’est là qu’il rencontre en 1944 Eva Aeppli (1925-2015) qui devient sa compagne et qu’il épousera par la suite (en 1951). Jean Tinguely exerce alors son métier de décorateur/étalagiste et s’intéresse à la peinture.
Jean Tinguely Impasse Ronsin à Paris.
Jean Tinguely et Eva Aeppli s’installent à Paris fin 1952. Alors qu’Eva réalise des poupées de tissu, Jean Tinguely continue son métier de décorateur et ses premières créations de sculptures métalliques qu’il expose à partir de 1954. En 1955, ils emménagent dans l’Atelier de l’impasse Ronsin. En 1960, Jean Tinguely se sépare d’Eva Aeppli pour vivre avec Niki de Saint Phalle (1930- 2002), rencontrée en 1956 (qu’il épouse en 1971 et avec laquelle il va collaborer pendant trente ans malgré leur séparation de 1973). En octobre 1960, Jean Tinguely signe le « Manifeste des Nouveaux Réalistes » avec ses amis Yves Klein, Daniel Spoerri et le critique Pierre Restany mais également Arman, François Dufrêne, Raymond Hains, Martial Raysse et Jacques de la Villeglé.
Les créations des années 1945-1960 : Une grande richesse et diversité d’inventions :
Influencé par l’art d’Alexander Calder, Jean Tinguely abandonne la peinture et commence à s’intéresser au mouvement dans l’espace.
« Le chat mobile » de Calder
Alexander Calder (1898-1976), sculpteur et peintre américain, est célèbre pour ses mobiles et ses stabiles. Il reçoit une double formation d’ingénieur et d’artiste qui stimule son extraordinaire inventivité. « Pourquoi l’art devrait-il être statique ? En regardant une œuvre abstraite, qu’il s’agisse d’une sculpture ou d’une peinture, nous voyons un ensemble excitant de plans, de sphères, de noyaux sans aucune signification. Il est peut-être parfait mais il est toujours immobile. L’étape suivante en sculpture est le mouvement ». Alexander Calder
Jean Tinguely aurait aussi pu être impressionné par Heinrich Anton Müller (1869-1930) un artiste suisse, peintre et sculpteur, l’un des représentants importants de l’art brut qui réalise d’imposantes machines. Vigneron, il construit des machines destinées à faciliter le travail des viticulteurs. L’une de ses inventions, une machine à greffer la vigne est brevetée en 1903, mais sans la preuve qu’elle ait été réellement construite. A 37 ans, atteint de troubles mentaux Heinrich Anton Müller est interné dans une clinique psychiatrique. Il y restera jusqu’à la fin de sa vie. C’est dans ce lieu qu’en 1914 il commence à s’exprimer artistiquement. Il construit des machines constituées de branches, de chiffons, de fil de fer ainsi que de grands rouages de différentes dimensions qui s’entraînent entre eux. Il ne subsiste plus que quelques photographies témoignant de ces étonnantes inventions détruites par leur créateur lui-même.
Une oeuvre de H.A Muller
Fasciné par l’assemblage des matériaux insolites et par le caractère non fonctionnel des mécanismes élaborés, Jean Tinguely réalise en 1954 des petites sculptures de fils de fer, à manivelle ou à moteur qu’il surnomme « Mes Moulins à Prières », des œuvres d’art animées sous le nom de « Méta mécaniques ».
Ces premières créations présentent des analogies formelles manifestes avec les machines mobiles de Mülller, les rouages agencés horizontalement et verticalement composent le même type d’assemblage.
J.Tinguely et le Moulin à Prières
« Le Moulin….
.. à prières »…
Les Méta-Matics : « Au moment où il crée la première de ses roues en fil de fer, Tinguely découvre une source presque inépuisable, un mécanisme dont l’objet n’est pas la précision mais l’anti-précision, une mécanique du hasard ». En 1959, il met au point ses machines à dessiner, les Méta-matics. À la fois sculptures, happenings et dessins. Il en réalise une vingtaine. Ce sont des sculptures animées qui se révèlent appareils à dessiner et à créer une œuvre d’art. Il suffit de placer une feuille de papier, d’appuyer sur un bouton pour mettre en marche le mécanisme et de laisser faire le bras dessinateur pour obtenir une sorte de dessin tachiste. Certaines Méta Matics sont portatives. Elles sont composées de métal et bois, fil métallique, courroies en caoutchouc, peintes en noir. De nombreuses autres sont fixes. Elles sont alors fixées sur un trépied en fer, des roues en bois, une feuille métallique façonnées, courroies en caoutchouc, tiges métalliques, le tout peint en noir avec un moteur électrique.
« Meta-Matic à dessiner » 1959
Meta-Matic à peindre
Meta-Matic 17 à peindre
L’art et la machine – le mouvement – La cinétique qui a le mouvement pour principe :
« L’artiste se fait bricoleur, soudeur, mécanicien, ingénieur, sculpteur. Il utilise essentiellement des pièces recyclées en métal brut, rouillé ou peint (fil de fer, tôle, acier, fer, aluminium) et en bois. Mais aussi de toutes les matières (papier, carton, tissu, caoutchouc, plastique, verre, voire de l’eau, Fontaine, 1960) et de toutes sortes d’objets (pièces mécaniques, tuyaux, outils, boîtes, vaisselle, jouets, sculptures, vêtements, chaussures, meubles, instruments de musique, appareils électriques, éléments animaliers comme les plumes, la peau ou le cuir et plus tard le squelette) ». Des décharges aux galeries d’art, Jean Tinguely a fait naître le mouvement dans l’art, transformant la ferraille en machines automatisées. « Il nous entraîne dans un monde chaotique où l’homme, perdu, ne maîtrise plus les objets ».
Le Transport En 1960, à son retour de New York, se tient à la Galerie des 4 Saisons à Paris, son exposition « L’art fonctionnel ». Pour transporter ses œuvres de son atelier de la rue de Poncin jusqu’à la galerie, Tinguely organise avec des amis Le Transport, autrement dit un convoi qui devient lui-même un happening :
« Gismo Parade » Paris mai 1960
Un engin à roues
Meta Matic sans date
Des tableaux animés et sonores :
Le Ballet des Pauvres – 1961
Ballet des Pauvres
Ballet des Pauvres
Les Philosophes – 1988
« Lorsqu’il conçoit la série de Philosophes pour son exposition en 1988, Jean Tinguely pose un regard critique sur une institution qu’il admire tout en stigmatisant le pouvoir culturel qu’elle incarne, au cœur de Paris, dans un bâtiment monumental. Les philosophes qui ont inspiré Tinguely depuis sa jeunesse, ainsi que quelques amis artiste et autres personnalités, constituent les références de cette trentaine sculptures animées que comporte la série. On peut reconnaître, sans qu’il s’agisse de véritables portraits, quelques attributs de ces penseurs, telles les plumes pour Jean-Jacques Rousseau, allusion à l’« état de nature »… »
Les philosophes
Au cours des années 1980, le thème de la mort occupe une place grandissante dans le travail du sculpteur comme dans « L’Enfer, un petit début »,une œuvre dans laquelle il pousse à l’extrême certaines de ses idées, notamment celle du mouvement.
« Enfer »
« Enfer » détails….
À partir de 1985, la santé de Jean Tinguely se dégrade et il doit être hospitalisé à plusieurs reprises. Il décède le 30 août 1991 à Berne. « Lorsque Niki de Saint Phalle et Jean Tinguely décident de se marier en 1971, ils ne forment déjà plus vraiment un couple mais sont liés indéfectiblement par l’art. Chacun se sent le plus à même de défendre les intérêts artistiques de l’autre, en cas de disparition de l’un d’entre eux. Ainsi, au décès de Tinguely, en 1991, Saint Phalle, épouse officielle, se retrouve avec la lourde responsabilité de gérer la succession de l’artiste, et de statuer sur le sort d’un musée dédié à Tinguely, dont les bases avaient été jetées du vivant de ce dernier. Il s’agit de choisir entre deux projets d’esprits diamétralement opposés. L’un est l’anti-musée conçu par Tinguely, qui avait déjà pris corps dans un gigantesque entrepôt, La Verrerie, isolé dans la campagne près de Fribourg, en Suisse, et visitable de façon restreinte. Dans une ambiance obscure, on pouvait y découvrir ses œuvres mais aussi celles de ses amis : Niki de Saint Phalle, Eva Aeppli, Daniel Spoerri, Bernard Luginbühl… L’autre projet, plus classique, peut être initié à Bâle, grâce au soutien du collectionneur et ami Paul Sacher, avec qui Tinguely avait souvent discuté d’un possible musée dans la ville de sa jeunesse. C’est cette seconde solution que choisit Niki de Saint Phalle, à l’encontre de l’avis de la plupart de ses amis, mais avec l’appui de Pontus Hulten, qui en sera le premier directeur et réalisera la muséographie de la présentation d’ouverture, en 1996 ». Extrait du dossier de Presse.
Musée Tinguelyà Bâle en Suisse
Les machines de Tinguely sont des anti-machines, plutôt que des machines. : « Mes machines ne font pas de la musique, mes machines utilisent des sons, je les laisse vivre leur vie, je les libère… L’unique chose stable, c’est le mouvement, toujours et partout » Jean Tinguely 1966.
Ici s’achève la deuxième partie de cette exceptionnelle exposition! Très vite vous retrouverez la troisième partie consacrée à Niki de Saint Phalle À très bientôt 🙂
Quand le Grand Palais, à Paris, ouvre ses portes en juin 2025, après quatre années de fermeture, c’est le Centre Pompidou qui ferme les siennes pour cinq ans de travaux de rénovation. C’est à ce mouvement de balancier que l’on doit la première manifestation « hors les murs » du Centre Pompidou, l’exposition coproduite par le Centre Pompidou et le GrandPalaisRMN :
« Niki de Saint Phalle, Jean Tinguely, Pontus Hulten, trois figures majeures de l’art du XXème siècle »
(Niki de Saint Phalle (1930-2002) franco-américaine, plasticienne – Jean Tinguely (1925-1991) suisse, plasticien – Pontus Hulten (1924-2006), suédois conservateur de musée ). 2025 marque le centenaire de la naissance de Jean Tinguely.
Niki de Saint Phalle
Jean Tinguely
Pontus Hulten
En mettant en lumière des moments clés de la carrière du couple mythique – Niki de St Phalle et Jean Tinguely – uni par des liens artistiques indéfectibles et une vison de l’art comme acte de rébellion contre les normes établies, l’exposition met en scène les relations des deux artistes plasticien.ne.s et du conservateur de musée qui s’est impliqué pour faire connaître au public leurs œuvres novatrices, et ouvrir les musées à un art ludique et rebelle.
« Au-delà de la célébration de deux artistes majeurs du 20e siècle, portés par la vision d’un homme de musée d’exception, cette exposition interroge leur horizon de pensée selon lequel la revendication d’une autonomie de l’art, la remise en question de l’institution et l’adresse directe au public, deviennent des moteurs de la création. » Commissaire Sophie Duplaix Conservatrice en chef des collections contemporaines Musée National d’Art Moderne – Centre Pompidou.
L’exposition se déploie sur deux niveaux : au premier niveau, c’est l’histoire de la rencontre entre Niki de Saint Phalle, Jean Tinguely et Pontus Hulten. Au second niveau, nous parcourons l’exposition « Tinguely », Centre Pompidou, Paris, 1988-1989 puis l’exposition « Niki de Saint Phalle », Centre Pompidou, Paris, 1980. En lien avec cette scénographie, nous allons vous présenter cette conséquente exposition en deux articles: l’histoire de la rencontre puis les expositions de Niki de Saint Phalle et de Jean Tinguely.
UNE HISTOIRE DE RENCONTRE
C’est dans l’impasse Ronsin à Paris, dans le quartier de Montparnasse, que des artistes de tous âges et origines travaillent. C’est là qu’au milieu des années 1950, Jean Tinguely fait la connaissance de Niki de Saint Phalle avec qui il se met en couple à partir de 1960 et qu’il partage son atelier. La destruction de l’impasse amène le couple à déménager.
« De Niki de Saint Phalle, nous connaissons les Tirs et les Nanas. De Jean Tinguely, Les machines en mouvement, Le Transport ou L’Enfer. En revanche, ce que nous connaissons moins de ce couple mythique c’est l’amitié qui l’unissait au conservateur de musée suédois Pontus Hulten ». Pour combler cette absence, l’exposition revient sur les coulisses de la création artistique. « Une œuvre n’est pas uniquement quelque chose d’achevé accroché à un mur, il y a tout un processus de création derrière, qu’il est important de révéler au public ». Un aspect souvent occulté par l’attention portée aux chefs-d’œuvre et moins à leur dessous. La preuve : aucun des visiteurs interrogés ne connaissait Pontus Hulten, encore moins son implication dans le travail de Niki de Saint Phalle et Jean Tinguely. » Sophie Duplaix.
Depuis la Suède, son pays d’origine, Pontus Hulten (1924-2006) défend une vision anarchiste de l’art et du musée qu’il conçoit comme des lieux de grande liberté et d’amusement. Initialement à la tête du musée d’art moderne de Stockholm, Pontus Hulten fut le premier directeur du Centre Georges-Pompidou de 1977 à 1981. En 1954, à l’occasion de l’un de ses fréquents séjours à Paris, Pontus Hulten rencontre Jean Tinguely, alors que celui-ci présente sa première exposition personnelle dans une galerie. D’emblée, les deux hommes partagent une même attitude vis à vis de l’art et de la vie, attitude qui a pu être qualifiée « d’anarchisme joyeux » : il s’agissait notamment d’offrir à l’individu une place dans la société, sous le signe d’une autonomie de pensée et d’action. Très vite, Niki de Saint Phalle, en couple avec Jean Tinguely, complète ce duo artistique. Il se dessine alors un début de collaboration et d’amitié qui ne s’arrêteront plus. Pontus Hulten sera le défenseur des deux artistes, toujours à leur écoute, les laissant exprimer leurs idées, leurs désirs, leurs envies et les faisant bénéficier de sa culture encyclopédique. En tant que professionnel de l’art, il leur offre des lieux pour exposer et des opportunités d’acquisition et de production d’œuvres.
Les quatre œuvres dans lesquelles Pontus Hulten a joué un rôle majeur :
L’exposition présente quatre œuvres majeures pour lesquelles Pontus Hulten a joué son rôle de défenseur et de facilitateur pour Niki de Saint Phalle et Jean Tinguely.
« Hon – en katedral » ( « Elle – en cathédrale ») 1966 – une œuvre intéractive, une gigantesque sculpture de femme qui occupe une salle entière du Musée de Stockholm. Niki de Saint Phalle fait une sculpture de femme monumentale de 28 mètres de longueur, couchée sur le dos. Elle est réalisée avec son mari Jean Tinguely et l’artiste suédois Per Olof Ultvedt.
Projet d’affiche pour « HON – en katedral »
Les artistesau travail pour l’exposition au Musée de Stockholm
Vue de l’expo de Stockholm en 1966...
… Vue de l’exposition au Grand Palais en 2025.
Le Paradis fantastique 1966 – 1967
Un ensemble de sculptures monumentales imaginé par Niki de Saint Phalle et Jean Tinguely en 1967 pour le toit du Pavillon français de l’exposition universelle de Montréal. C’est le deuxième projet d’envergure réalisé par Niki de Saint Phalle et Jean Tinguely. Le couple se lance dans la construction de sculptures par groupes de deux destinés à parodier une joute amoureuse cruelle entre le masculin et le féminin. Chaque duo est réalisé par les deux artistes et trois sculptures sont faites uniquement par Niki de Saint Phalle. Après ce projet qui a impliqué pour Niki de Saint Phalle l’usage de matériaux toxiques, sa santé va se dégrader, en accentuant ses problèmes pulmonaires. Cet ensemble de sculptures monumentales risquait la destruction à l’issue de sa présentation. Les artistes font appel à Pontus Hulten qui va réunir le financement nécessaire pour rapatrier l’œuvre en Europe à la condition que l’œuvre soit donnée à son musée de Stockholm.
« Le Paradis Fantastique ».
Dessins préparatoires pour « Le Paradis fantastique ».
Maquette de « Le Paradis fantastique »
« Le Paradis fantastique »….
… à Stockholm….
Détails….
Le Cyclop, Milly-la-Forêt, 1969-1974
A la fin des années 1960, Jean Tinguely imagine, avec Niki de Saint Phalle et l’artiste suisse Bernhard Luginbühl, réaliser en secret une tête monumentale, « un monstre », au cœur de la forêt, dans l’Essonne. L’élaboration de ce projet dure 25 ans. Tinguely en orchestre la construction et invite plusieurs amis artistes à présenter une œuvre au sein de cette sculpture gigantesque. Victime de vandalisme, Le Cyclop est donné à l’État français en 1987. Après la mort de Jean Tinguely en 1991, et selon ses instructions, Niki de Saint Phalle poursuit l’achèvement de la sculpture avec l’aide de Pontus Hulten. Le Cyclop a ouvert au public à Milly-la -Forêt, dans l’Essonne en 1994.
« Le Cyclop »
Étude pour « Le Cyclop »
Étude pour « Le Cyclop » 1968.
« Le Crocrodrome de Zig & Puce » Centre Pompidou. Paris 1977.
En 1977, Pontus Hulten invite Jean Tinguely, Niki de Saint Phalle, Bernhard Luginbühl, avec d’autres collaborateurs, à réaliser une œuvre collective d’envergure pour le Forum du Centre Pompidou. « Le Crocrodrome de Zig & Puce » se présente comme un monstre d’une trentaine de mètres de longueur. La mâchoire est imaginée par Niki de Saint Phalle, les intestins par Bernhard Luginbühl et le dos par Jean Tinguely. Son ventre est un train fantôme et le tout est traversé par un circuit de boules métalliques. L’installation est construite devant le public et détruite également en présence du public après 7 mois d’activité. Pontus Hulten, alors Directeur du Centre Pompidou, a permis au public de s’approprier une œuvre par le jeu.
Affiche « Le Crocrodrome »
Dessin d’étude pour « le Crocrodrome »
Les Lettres-dessins à Pontus
Cette correspondance révèle le haut degré d’intimité et de confiance qui a existé entre Niki de Saint Phalle, Jean Tinguely et Pontus Hulten. Dans une même lettre, on trouve des propos sur une œuvre, une exposition, des requêtes pressantes quand les artistes ont besoin d’aide… Avec toujours beaucoup d’humour et de simplicité. L’écriture part dans tous les sens, celle de Jean Tinguely s’agrégeant à celle de Niki de Saint Phalle ou l’inverse, le tout agrémenté de dessins, croquis, collages. Ces échanges montrent à quel point l’art et la vie sont, pour les trois protagonistes, intrinsèquement liés.
Le Grand Palais se trouve 3 avenue du Général Eisenhower 75008 Paris L’exposition est visible jusqu’au 4 Janvier 2026.
Le Musée Maillol de Banyuls-sur-Mer dans les Pyrénées Catalanes, consacre un accrochage inédit à la dernière œuvre d’Aristide Maillol, « Harmonie » (1940-1944), sculpture monumentale restée inachevée. C’est à Banyuls, son village natal, que l’artiste trouve refuge dès 1939, fuyant les tumultes de la guerre. Il y entame ce projet ambitieux avec son modèle et muse, Dina Vierny, alors âgée de vingt ans. Maillol, qui jusqu’alors sculptait « d’imagination », décide cette fois-ci de travailler au plus près du corps vivant, dans une quête de vérité et de sensualité inédite dans son œuvre. Chaque jour, Dina pose pour lui, à l’atelier de la maison rose puis dans la métairie en montagne, dans un dialogue intime entre l’artiste et son modèle. Le projet devient obsessionnel : torses, figures en pied, avec ou sans tête ou bras… Maillol recommence, reprend, modifie sans cesse, cherchant l’équilibre parfait entre idée et réalité. « Il m’arrive de tout refaire dix fois », confie-t-il, accablé par l’exigence du geste.
Mais cette création se double d’un récit d’aventure. Dina, impliquée dans des réseaux de résistance, disparaît parfois sans prévenir. Elle est arrêtée, emprisonnée, libérée grâce à l’intervention d’Arno Breker (sculpteur allemand, proche du IIIe Reich)… Puis revient à Banyuls pour poser de nouveau. L’histoire de « Harmonie » épouse ainsi celle de la guerre et de la liberté. En août 1944, Dina repart assister à la libération de Paris. Elle ne reverra pas Maillol, qui décède un mois plus tard, à l’age de 83 ans. « Harmonie » reste inachevée, mais incarne l’aboutissement d’une vie dédiée à la forme féminine.
L’exposition réunit les quatre états conservés de la statue, deux torses, une tête, des dessins, des peintures, des photos, ainsi que des documents d’archives. À travers ce parcours sensible et documenté, le musée invite à découvrir comment, en pleine tourmente, Maillol parvint à créer une œuvre à la fois intime, charnelle et sereine : son ultime chef-d’œuvre.
Plus qu’une simple rétrospective, l’exposition est une véritable enquête, mêlant aspects plastiques, historiques et humains. Elle présente les différentes étapes de la création révélant les silences et les tensions sous-jacentes à l’œuvre. Car derrière la douceur apparente d’ »Harmonie », c’est une histoire de lutte, de résilience et de beauté en péril qui se raconte.
Ce petit musée, réalisé dans la maison de l’artiste – lieu magnifique, isolé, où Maillol a créé tant d’oeuvres – propose en exposition permanente de découvrir son quotidien ( reconstitution de sa cuisine et d’une salle à manger, films, photos..) et une riche collection de ses oeuvres. Dans le jardin, sous les pins, se trouve sa tombe protégé par une de ses sculptures : « Méditérranée ».
Esquisses pour…..
… « Harmonie ».
« Harmonie » 1e état vers 1940/44
Tête de « Harmonie » (Dina Vierny) vers 1943
Dina Vierny posant pour « Harmonie » Mai 1943.
Atelier d’Aristide Maillol avec la sculpture « Harmonie ».
Maillol travaillant à « Harmonie dans son atelier 1940.
Les mains de Maillol sur la sculpture « Harmonie » Mai 1943.
À PERPIGNAN : DEUX ARTISTES
À Perpignan découvrez un dialogue inédit au musée Rigaud, entre Aristide Maillol et Pablo Picasso, deux artistes qui se sont mutuellement influencés. Cette passionnante exposition « Maillol Picasso – Défier l’idéal classique » réunit pour la première fois et dans une scénographie inventive et lumineuse deux artistes que tout aurait pu séparer mais qui se retrouvent étonnamment à travers leur oeuvre. Regarder simultanément une sculpture de Maillol et un tableau de Picasso fait exploser des évidences et nous convie à une sorte de danse jubilatoire entre les oeuvres pour découvrir les autres « couples » d’oeuvres ! Cette exposition se vit plus qu’elle ne se visite et chaque réunion d’oeuvre nous projette vers les suivantes, puis nous incite à revenir sur nos pas avec un regard déjà différent… On apprend beaucoup de cette exposition et on en sort avec le sentiment d’avoir découvert de nouveaux artistes ! Des visites guidées, des conférences et des animations très interessantes sont organisées durant toute la période de l’exposition.
« Aristide Maillol (1861-1944) et Pablo Picasso (1881-1973) sont deux artistes intimement liés aux collections et à l’histoire du musée d’art Hyacinthe Rigaud. Le premier pour avoir doté la ville de Perpignan de l’un des bronzes originaux de « Méditerranée », le second pour avoir élu domicile durant ses villégiatures à Perpignan, de 1953 à 1955, à l’hôtel de Lazerme qui abrite l’actuel musée d’art Hyacinthe Rigaud. L’exposition « Maillol Picasso – Défier l’idéal classique » nous dévoile les secrets d’une rencontre inédite qui révèle la modernité de Maillol et la subtilité d’influences mutuelles. Eh oui ! Picasso regarde Maillol tandis que Maillol s’intéresse à sa période cubiste. Plongez au cœur d’un parcours où les œuvres des deux artistes dialoguent en 6 sections et 110 œuvres scénographiées dans un espace dédié de 400 m2 pour proposer un nouveau regard sur l’œuvre des deux artistes. De la sculpture à la peinture, du dessin à la gravure, il s’agira de retrouver les points de convergences esthétiques et techniques des deux artistes autour de leur identité catalane, de la féminité, du portrait, ou encore des paysages du Roussillon. » (…) Même si les chemins de Maillol et de Picasso se sont croisés à Paris, la rencontre qui est le point de départ de cette exposition est tardive, postérieure même à la mort de Maillol puisqu’elle se situe entre 1953 et 1955 lorsque Picasso séjourne à Perpignan . Durant cette période, Picasso se rapproche de ses origines et ne manque pas de regarder l’oeuvre de Maillol dont les sculptures trônent dans l’espace public. Face à Maillol, Picasso revient spontanément à l’esthétique classique qu’il avait abordée entre 1920 et 1934. (…) Maillol et Picasso suivent des trajectoires artistiques bien différentes dont les accords et les discordances prennent sens en terre catalane. Picasso vit à Barcelone dès l’âge de quatorze ans, tandis que Maillol, de vingt ans son aîné, est natif de Banyuls-sur-Mer et y revient sa vie durant. Cette terre reste un trait d’union entre les deux artistes qui se reconnaissent au travers d’une même langue lorsque Picasso entonne un chant catalan à l’occasion de sa première rencontre avec Maillol, entre octobre 1902 et janvier 1903. Quelques années après, en 1906, c’est au cours d’un séjour d’un mois dans les Pyrénées que Picasso renoue avec la simplicité d’un quotidien dont l’authenticité consacre une ruralité si chère à Maillol. Les feuillets de son carnet de croquis, dit catalan, se couvrent d’une réalité quasi ethnographique où les silhouettes de catalanes vaquant au quotidien se succèdent. (…) Maillol cultive avec constance une personnalité attachée à son terroir (« Maillol » cela veut dire : jeune vigne au bord de la mer.) Héritier d’une tradition viticole, l’authenticité de cet enracinement s’exprime dans un paysage peint de jeunesse : la « Tête de Catalane » qu’il modèle vers 1898 qui fixe au travers de son voile l’empreinte d’une appartenance identitaire. Entre tradition et modernité, cette pièce est unique et a sans doute une place à part qui amorce l’évolution d’une esthétique où la catalinité prend une dimension conceptuelle dans la nudité de corps trapus et dépourvus de tout attribut. (Extraits du dossier de Presse)
« La Méditérranée » de Maillol et « Les femmes devant la mer » de Picasso
Maillol : « La Méditerranée » détail.
Picasso : « Les femmes devant la mer » Détail.
Portrait de Dina Vierny par A.Maillol.
Picasso : « Tête de femme couronnée de fleurs » 22 juillet 1969
Sculptures de Maillol et derrière : « Guernica » de Picasso.
« L’air » de Maillol. Tout au fond : une photo de Picasso regardant une sculpture de Maillol.
Le musée Maillol de Banyuls se trouve dans la Vallée de la Roume à 5mn du Centre Ville (Bien fléché et parking) L’exposition estprolongée jusqu’au 31 décembre, pour être en harmonie avec le musée Rigaud
Le musée Hycinthe Rigaud est au 21 rue Mailly à Perpignan (Centre Ville) L’exposition durera jusqu’au 31 décembre 2025.
Le billet d’entrée dans l’un des deux musées vous offre une réduction dans l’autre musée !
Jusqu’au 4 Janvier 2026, le musée Fabre de Montpellier présente une superbe exposition sur Pierre Soulages. Cette exposition, intitulée « LA RENCONTRE », nous propose de partager la rencontre de l’artiste avec l’Histoire de l’Art, en mettant en regard certaines oeuvres de Pierre Soulages et des tableaux célèbres. Le musée Fabre a lié depuis de nombreuses années une relation privilégiée avec Pierre Soulages qui disait que « Plus que tout autre ce musée a compté pour moi !« En 2005, Pierre et Colette Soulages ont fait don au musée de 20 toiles, mis en dépot dix autres et le musée a fait l’achat de deux « Outrenoirs » de l’artiste en 1975 et 1999. Pour son bicentenaire le musée Fabre a donc tout naturellement choisi d’honorer Pierre Soulages.
Sur trois niveaux et plus de 1200 m2 sont exposées plus d’une centaine d’oeuvres de Soulages et des toiles de Rembrandt, Mondrian, Van Gogh et bien d’autres… On retrouve également des oeuvres issues d’échanges ou d’amitiés avec des artistes comme Hartung, Bergman, Bloch ou Zao Wu Ki.
La magie de cette exposition réside en ce que l’on a l’impression de voir les tableaux de Soulages pour la première fois ! cf : « L’Art d’être Curieux » du 17/08/2020 🙂 La mise en espace, à la fois épurée et lumineuse de Maud Martinot (architecte et scénographe d’expositions), incite à la contemplation et à l’émerveillement, voire à l’interrogation devant le « Saint Agathe » de Zubaran, par exemple, qui nous paraît si éloigné de Soulages… Et pourtant… Chaque rencontre est soigneusement orchestrée et nous amène à regarder autrement l’oeuvre de Soulages.
On peut visiter l’exposition dans le sens du parcours autour de six thèmes, mais aussi lâcher le sens de circulation et ne pas hésiter à revenir en arrière pour repartir… Revoir les débuts du peintre et son admiration pour les peintures rupestres nous fera apprécier d’autant plus certaines oeuvres plus récentes.
Peinture 195×130 cm . 2 octobre 1960
P.Soulages et Anna-Eva Bergman. 1962.
« Les mains de Pierre Soulages » D.Hudson. 2006.
« Forme sombre » Anna-Eva Bergman. 1956
« Composition » Hans Hartung 1945
Statue Menhir de la Verrière IVe-IIIe millénaire avant notre ère.
« 29.03.65 » Zao Wou-Ki 1965
« Marine sombre » Max Ernst 1926
Ne quittez pas le musée Fabre sans passer par la librairie où vous allez vivre une expérience incroyable ! « Outrenoir » est une réalisation en réalité virtuelle qui nous emmène de la terrasse de la maison des Soulages à Sète, jusqu’aux hauteurs de l’abbaye de Conques tout en nous plongeant dans le goudron et les galeries de Lascaux… Mais… CHUUT ! On ne vous en dit pas plus… (Une réalisation de Gordon pour la société de production Lucid Realities, sur des textes de Pierre Soulages dits par Isabele Huppert.)
Pierre Soulages
EN TRAVERSANT LE VIADUC…
Si l’exposition « La rencontre » au musée Fabre de Montpellier vous a donné envie de (re)voir le musée Soulages de Rodez et/ou l’abbaye de Conques, vous prendrez la route… … Et vous devrez absolument vous arrêter à Millau, précisement au MUMIG ( Musée de Millau et des Grands Causse) pour admirer le remarquable travail de création de CHRISTOPHE HAZEMANN (co-directeur du musée Soulages de Rodez) : « UN PAS DE CÔTÉ» . Cette exposition présente 25 œuvres photographiques, majoritairement réalisées à partir des œuvres de Pierre Soulages. La sensibilité et la finesse de perception de Christophe Hazemann émeuvent beaucoup… « Voir au delà des apparences, tenter de se décentrer pour adopter le point de vue de l’objet, du reflet, du défaut apporte de la profondeur à notre perception (…) Tentons, nous aussi ce pas de côté». (Extrait du livret de visite)
Christophe Hazemann
Présentation de l’exposition par Christophe Hazemann
Un film vidéo issu du spectacle « Sol Agens » (2024) vous transportera au cœur des Outrenoirs … Les oeuvres photographiques sont accompagnées des poèmes de Jean-Yves Tayac, ami de Pierre Soulages.
Pierre Soulages et Christophe Hazemann.
L’exposition – prolongée pour la durée des congés de la Toussaint – propose un livret-jeu pour se familiariser avec la photo, l’oeuvre de Pierre Soulages et l’abstraction, voire de rencontrer Christophe Hazemann qui anime des visites guidées de l’exposition !
Le Musée Maillol de Paris présente l’exposition : « ROBERT DOISNEAU – INSTANTS DONNÉS » Une importante rétrospective, (350 clichés sélectionnés parmi les 450 000 que renferme la collection) conçue par un commissariat collectif associant « Tempora » (organisateur d’expositions belge) et « l’Atelier Doisneau » conduit par Annette Doisneau et Francine Deroudille (filles du photographe) et la collaboration du Musée Maillol.
Témoignant de son époque des années 1930 aux années 1980, Robert Doisneau a photographié l’enfance, sa banlieue parisienne, les ateliers d’artistes peintres et sculpteurs rencontrant au passage l’œuvre de Maillol, la mode et le luxe d’après-guerre tout en dressant le constat social d’un monde sans indulgence dont il se sentit toujours solidaire. « Le parcours se décline autour d’une dizaine de thématiques transversales de l’œuvre de Robert Doisneau. Des titres simples qui reprennent le classement de l’agence, et par la suite de l’Atelier (Enfance, Bistrots, Écrivains etc…). Plusieurs salles et dispositifs qui offrent des focus inédits pour découvrir l’univers créatif complet de l’artiste. Pour Robert Doisneau, la photographie n’est pas qu’un simple reflet du réel : elle est un moyen d’expression destiné à nos sens et à nos émotions . » (Extraits du Dossier de Presse)
Né le 14 avril 1912 à Gentilly (Seine, Val-de-Marne), orphelin de père et mère à l’âge de 8 ans, il sera élevé par sa tante. À 13 ans, après son certificat d’études, il entre à l’École Estienne, (École supérieure des arts et métiers graphiques de Paris), pour y apprendre la gravure lithographique. Il obtient son diplôme de graveur et lithographe. Il a souvent confié qu’il n’avait pas aimé ses années à l’école Estienne. La pédagogie y était en effet très archaïque dans les années 1920. Cependant, durant ces quatre années d’études et de formation, il apprend à dessiner et à regarder. Autant de compétences précieuses qui influenceront son œil de photographe.
En 1931, Robert Doisneau abandonne sa carrière de lithographe et devient l’assistant d’André Vigneau, photographe moderniste. En 1932, il vend sa première photographie au magazine « Excelsior ».
L’ENFANCE : « Les journées paraissent courtes à l’enfant qui folâtre dans la rue pleine de trouvailles possibles et, parfois, de mystères qui font un peu peur. » Robert Doisneau
Salle « Enfance » de l’exposition.
Ce thème traverse l’œuvre de Doisneau qui ne cessa de photographier l’enfance, tout attiré qu’il est par l’innocence de ses modèles, leur enthousiasme et bonheur de l’instant partagé ; par ce qu’ils lui rappellent aussi de sa propre enfance, lui qui fut orphelin de mère et de père à l’âge de 8 ans : « Désobéir me paraît une fonction vitale et je dois dire que je ne m’en suis pas privé ».
« L’affiche, « Le saut » (Paris 1936) donne le ton de cette première séquence… Le regard des enfants, des images graphique, dynamiques, une lumière naturelle comme dans toutes les photos en noir et blanc de Doisneau… Une photo rare et quasiment jamais publiée. » (Extrait du Dossier de Presse.)
« La première maîtresse » 1935.
« Le temps des bérets » 1936
« Les rêveurs ».
« En cercle » (Intérieur) 1956.
« En cercle » (Extérieur) 1950.
« Les jardins du Champs de Mars » La fin de la guerre 1945.
ATELIERS D’ARTISTES :
« Il n’y a pas de hasard, il n’a que des rendez-vous »
Pendant les années de guerre (1939 – 1945) Robert Doisneau, réfractaire au Service du Travail Obligatoire, va réaliser, tout au long de l’Occupation, toutes sortes de faux papiers pour la Résistance, grâce à ses talents de graveur-lithographe. Entre deux commandes et deux travaux clandestins, il capturait quelques scènes de la vie quotidienne sous l’Occupation : files d’attente devant les boutiques, refuges dans le métro durant les alertes, etc. Pendant ces années noires, Doisneau fit une rencontre importante, celle de Paul Barabé dit Baba. Concierge de son immeuble, Barabé brûle la liste des communistes de Montrouge et évite ainsi leur arrestation par la Gestapo. Touché par cet acte de bravoure, Doisneau l’embauche en tant qu’assistant pour faire ses tirages et les livraisons.
Le lapin de M.Barabé. 1945.
Entre fin 1944 et le début 1945, Robert Doisneau prend 48 photos de la reconstitution de l’activité des imprimeurs clandestins, pour illustrer le numéro de mars 1945 de la revue artistique et littéraire le Point de Pierre Betz. Cette édition est consacrée aux imprimeries clandestines de la Résistance qui permirent la diffusion de tracts, affiches et journaux durant la guerre. Cette rencontre va être déterminante pour Robert Doisneau puisque Pierre Betz va le nommer photographe attitré de la revue. Il y restera jusqu’en 1960. C’est ainsi qu’il va aller à la rencontre d’artistes dans leurs ateliers. Doisneau photographie le lieu où l’idée devient œuvre. Il applique à l’atelier le même principe que pour tous les métiers : être au plus près de l’outil de travail. Les ateliers constituent un environnement naturel pour Robert Doisneau où il déploie son talent de portraitiste et de metteur en scène.
Salle des ateliers d’artistes.
Gaston Chaissac (peintre) 1952
Giacometti dans son atelier .1957
Braque. Paris. 1957.
Niki de Saint Phalle et ses « nanas ». 1971
Les pains de Picasso. 1952
La photo « Les pains de Picasso » a une histoire : « Picasso aura été l’un des meilleurs modèles qui soient entrés dans ma petite boîte noire… Quand j’arrive chez lui à Vallauris, le matin, après avoir roulé toute la nuit, il est entrain de prendre son petit déjeuner. Sur la nappe, deux petits pains en forme de mains. ‘’ Vous voyez, c’est une idée de boulanger, ils n’ont que quatre doigts. C’est pour cela qu’il les a baptisés des Picasso ‘’. Comme il paraissait d’excellente humeur, j’ai osé mettre un pain de chaque côté de son assiette. Il a fait le geste que je souhaitais, mettant les bras au ras de la table avec les pains dans leur prolongement… Avec Picasso, c’était bien facile, il suffisait de lui tendre un accessoire, il improvisait immédiatement un pas de deux… Impatient jusqu’à me dire ‘’Qu’attendez-vous ?’’. Précisément, j’attendais qu’il me dise ‘’qu’attendez-vous ?’’ » Extrait du livre « Robert Doisneau – A l’imparfait de l’objectif – souvenirs et portraits » Editions Babel 1989 »
AGENCES, PUBLICATIONS, PUBLICITÉS :
Avant d’être engagé par Pierre Betz de la revue artistique et littéraire « Le Point », Robert Doisneau a fait connaissance avec Charles Rado, immigré hongrois qui crée à Paris la première agence de presse photographique, « RAPHO » pour organiser la profession de photographe illustrateur qui est en train de s’inventer. Robert Doisneau le rencontre dès 1939 alors qu’il vient d’être licencié des usines Renault dans lesquelles il était photographe depuis 1934. Il espère pouvoir rejoindre cette agence dans laquelle il dépose un premier reportage. L’Histoire en décide autrement. La déclaration de guerre met un frein brutal au projet, provoque l’exil américain définitif de Charles Rado, et la fermeture de l’agence.
L’agence Rapho redémarre en 1946. Doisneau la rejoint et y reste jusqu’à la fin de sa vie. Il y côtoie Willy Ronis, Sabine Weiss, Janine Niepce, Jean-Philippe Charbonnier, Édouard Boubat. Tous représenteront la photographie dite « humaniste ». Robert Doisneau fait également partie du « Groupe des XV » fondé à Paris en 1946. (Ces quinze photographes ont pour objectifs de faire reconnaître la photographie comme moyen d’expression artistique à part entière ainsi que la sauvegarde du patrimoine photographique français. Le groupe est dissous en 1957.)
En 1947, Robert Doisneau remporte le prix Kodak, destiné à récompenser les jeunes talents. Les reportages s’enchainent, Robert Doisneau travaille beaucoup pour la presse au lendemain de la guerre, comme par exemple « Action » l’hebdomadaire communiste dirigé par Pierre Courtade, « La Vie Ouvrière », organe de presse de la CGT, mais aussi « Regards », « Point de vue – Images du monde », « Réalités », « Match » ou encore le magazine américain « Life ». Ses clichés étaient utilisés pour la presse généraliste ou spécialisée, de toutes tendances. Il choisissait des mannequins dans son entourage et il réalisait les montages en studio.
L’équipe de l’Agence « Rapho ». De gauche à droite: R.Doisneau, W.Ronis, R. Grosset, J.Niepce, J-P Charbonnier, E.Boubat et S. Weiss.
Couvertures de magazines des années 30 à 80.
Couverture Février 1945
La salle « Vogue ».(« Magazine féminin »)
LA SALLE DES ÉCRIVAINS ET LES BISTROTS :
Salle des écrivains ( à droite photo de Jacques Prévert, poête)Mademoiselle Anita. 1951.
«Mademoiselle Anita » (1951), est l’une des photos de la série que Robert Doisneau consacre aux bistrots : « S’il vous plaît, ne changez rien, ne bougez rien, je vous expliquerai après » demande Doisneau à son modèle. « Elle a dû se rendre compte de l’effet produit car, sans même lever les yeux, elle a gardé cette attitude de pudeur obstinée qui lui allait si bien… ».
«Les bouchers mélomanes » (1953). « Je maintiens qu’il est bon de posséder un bistrot familier. Deux, c’est encore mieux », affirmait Doisneau pour cette photo prise dans un bistrot du quartier Mouffetard à Paris. « Est-ce que ça vous ennuie si je fais une photo de vous ? », demanda Doisneau à la chanteuse. « Non », lui répondit-elle. « Alors j’ai mis discrètement un peu d’argent dans la soucoupe : ça a dû lui plaire. Et j’ai deux trois photos d’elle. En fait, la meilleure photo d’elle, que j’ai, c’est ce jour-là ».
GRAVITÉS :
Scène de vie.
Boulevard St Michel. Mai 1968.
«L’usine Bobin, à Montrouge » (1945). Doisneau a beaucoup photographié les ouvriers de l’industrie d’un monde en pleine mutation. Autant de sites photogéniques au cœur desquels l’objectif du photographe se confronte au réel d’une classe sociale dont il exprimera sans relâche les difficultés.
BANLIEUES :
FACE À L’OEUVRE :
Au Louvre, en 1945, la Joconde est présentée sur un chevalet, la foule pouvant circuler devant et autour d’elle, en grande proximité. Doisneau scute alors les expressions des visiteurs…
Devant la Joconde…
… 1945.
En 1948, Robert Giraud écrivain et ami de Doisneau, gardien de la galerie Romi, lui signale que le tableau d’un certain Wagner suscite de réactions cocasses… Rendez-vous est pris… « Bien installé dans un moelleux fauteuil, appareil posé sur un meuble, je voyais au travers de la glace dont les reflets me rendaient invisibles, les passages et les réactions des différents iconolâtres »
Vitrine de la galerie Romi….
… 1948.
RENCONTRES :
« Sèvres ET Babylone »
« Les coiffeuses au soleil » 1966.
« Les coiffeuses au soleil » : une scène de rue parisienne, comme Doisneau les affectionnait tant. « On se met à un tel endroit, où ça vous arrange. Donc… c’est… c’est une espèce de faux témoignage… Ah oui… Mais on se sert de matériaux vrais, ça c’est… c’est bien. Ça donne une solidité. Mais on y croit comme ça », exprimera Robert Doisneau sur ce type de cadrage.
DIALOGUE DOISNEAU/MAILLOL :
Le 29 juin 1964, Robert Doisneau se rend à l’agence Rapho… En traversant le Jardin des Tuileries avec son Leica en bandoulière, il croise des costauds de la Maison Gougeon, transporteurs d’art, et il assiste au déballage de sculptures de Maillol dont l’installation avait été décidée par le ministre de la Culture, André Malraux, et Dina Vierny, dernier modèle de Maillol. L’occasion est trop belle ! Il oublie sa commande publicitaire et passe la journée à photographier la pose des statues, sous l’œil de Dina Vierny (en bas à gauche sur la photo de droite) qui le gratifie de sa présence… Un merveilleux cadeau du hasard… ou un rendez-vous ? 🙂
La dépose des statues de Maillol. 1964.
LE BAISER DE L’HÔTEL DE VILLE :
Doisneau a également été sous contrat avec le groupe américain Conde Nast pour le magazine de mode féminin « Vogue » entre 1949 et 1951.
C’est en 1950, dans le cadre d’une commande d’un reportage sur l’amour à Paris pour le magazine Life, qu’il réalise « Le Baiser de l’Hôtel de Ville ». Cette photographie ressortira avec grand succès dans les années 1980 et deviendra une image iconique du Paris des années 1950. A elle seule, cette image en noir et blanc d’un couple d’anonymes s’embrassant devant la Mairie de Paris suffit pour que le nom de Doisneau soit prononcé… Mythique ! « Cette photo m’inquiète un peu : ce succès montre que c’est une chose très, très facile, un effet facile … C’est une photo qui fait l’unanimité. Et quand il y a unanimité, il y a souvent au départ une erreur. » Robert Doisneau
Exemple de détournements de la photo : « Le baiser de l’Hotel de Ville » , lors des attentats de 2015, du Covid etc.
C’est sur cette photo projetée sur un rideau que s’achève la visite de l’exposition : « Robert Doisneau – Instants volés »
Robert Doisneau qui photographia l’enfance, les gens de labeur, les gens de peu, les gens de rien, Paris, la banlieue, leurs bistrots, les ateliers d’artistes, les écrivains, la mode aussi… Bref, la vie, avait sinon un œil de lynx, la patience du chat. « Oh là là, Si vous me voyiez faire ! J’ai honte. D’abord honte de rester sur place parce que… J’ai l’air d’hésiter, mais j’hésite… En réalité. Je ne sais pas ce que j’attends… Mais j’attends. J’attends. J’ai l’espoir. Et alors… ».
« Toute ma vie je me suis amusé, je me suis fabriqué mon petit théâtre. » Robert Doisneau
Musée Maillol : 61 rue de Grenelle 75007 PARIS
Kadia et Sylvie vont prendre un peu le large et vous retrouveront mi septembre !
Photo : »Francine et Annette » les filles de Robert Doisneau…
Jusqu’au 12 Octobre, la municipalité d’Aix en Provence invite le public à rencontrer Paul Cézanne dans sa maison natale, « le Jas de Bouffan » – magnifique bastide du XVIIIe siècle – puis dans son atelier « l’Atelier des Lauves« , et enfin à travers une exposition de plus de 130 oeuvres venant du monde entier et réunies pour la première fois (dessins, peintures, photos..) au musée Granet : « Cézanne au Jas de Bouffan »).
Paul Cézanne est un personnage intrigant qui dévoile – à travers cet événement – un caractère plutôt fantasque… Sa personnalité changeante et exacerbée le conduira à des actions étonnantes comme d’utiliser les murs du grand salon du Jas de Bouffan comme support de ses peintures, ou réaliser 97 versions de la montagne Ste Victoire… (Dont une seule est exposée au musée Granet…) « Précurseur de l’Art Moderne », comme se plaisent à dire les historiens d’Art, il est surtout un homme d’une vive sensibilité qui va chercher à faire partager sa vision du monde qui l’entoure en simplifiant formes et détails pour faire surgir l’émotion.
LE JAS DE BOUFFAN :
Né en 1839 et mort en 1906, Paul Cézanne était un amoureux de la Provence, qu’il n’a cessé de sublimer dans son œuvre. S’il aimait sa ville natale, Aix-en-Provence, il préférait s’éloigner du centre-ville pour peindre au calme. Et c’est ici-même, dans cette Bastide, que le peintre a débuté . « Le Jas de Bouffan, tant à l’intérieur, qu’à l’extérieur, deviendra le motif privilégié de Cezanne pendant une longue période« , raconte Bruno Ely, directeur du musée Granet.
Le Jas de Bouffan.
La cuisine du Jas de Bouffan.
En 1859, au moment de l’acquisition du Jas de Bouffan par Louis-Auguste Cezanne, le père de Paul Cezanne, la propriété de quatorze hectares est essentiellement agricole, puisqu’à côté d’amandiers, mûriers, oliviers, on y cultive la vigne.
Cette demeure familiale restera la propriété des Cezanne pendant 40 ans. Jusqu’en 1870, elle ne sera occupée que durant les périodes estivales.
Opposé au projet de son fils d’être peintre, Louis-Auguste Cezanne va l’« autoriser » à peindre sur les murs du salon … Pour mesurer ses talents ? C’est ainsi que, dans cette grande bastide du XVIIIᵉ siècle, le jeune peintre de 20 ans va se dépenser pour recouvrir tous les panneaux disponibles d’une peinture à l’huile que d’aucuns appelaient « couillarde », c’est à dire empâtée, agressive parfois, une peinture d’un Cezanne qui, avant l’impressionnisme, se découvre puissamment peintre.
Ce grand salon fut son premier atelier, et pourtant, Cézanne n’a pas hésité à recouvrir ses toutes premières œuvres. C’est ce que révèle la visite du Jas de Bouffan. Si la plus grande partie de ces premières œuvres ont pu être transposées sur toile, et exposées au musée Granet, il reste encore aujourd’hui des fragments découverts récemment dans le Grand Salon.
Le Grand Salon : reconstitution numérique.COMMENTAIRES SUR LE GRAND SALON DE DENIS COUTAGNE. CO-COMMISSAIRE.
Cézanne va entretenir un lien très fort avec cette maison familiale qui a nourri sa peinture et qui est devenue le centre de gravité de sa vie. Jusqu’en 1899, il reviendra sans cesse au Jas de Bouffan. À partir des années 1870, la famille va occuper à plein temps le Jas. Finalement convaincu par les capacités de son fils à être un artiste peintre, son père lui installe un atelier au deuxième étage, éclairé par une grande verrière fendant la toiture, d’où sortiront ses plus grands chefs-d’œuvre.
Atelier du Jas de Bouffan
Dans cet atelier, Cézanne ne va pas seulement représenter la bastide, il y peint également ses premiers portraits : des membres de sa famille, des amis ou des ouvriers agricoles de la ferme voisine.
Galerie de portraits. Entrée du Jas de Bouffan.
La galerie de portraits de Cézanne.COMMENTAIRES DE LA GALERIE DE PORTRAITS PAR BRUNO ELY DIRECTEUR DU MUSÉE GRANET.
L’allée des marronniers.
L’étang.
DANS LA SALLE À MANGER DU JAS DE BOUFFAN : EXPOSITION DES TABLEAUX DESTINÉS À ÊTRE INSTALLÉS EN EXTERIEUR, LÀ OÙ CÉZANNE LES A PEINTS.
A la mort de son père en 1886, Paul Cézanne partage la propriété en indivision avec ses deux sœurs (Marie et Rose) mais, à la mort de leur mère en 1897, Rose veut récupérer sa part. Le Jas de Bouffan sera donc vendu en 1899.
L’ATELIER DES LAUVES :
Après la vente du domaine familial, Cézanne s’installe dans le quartier de l’Hôtel de Ville – rue Boulegon précisément – et il achète un terrain sur la colline des Lauves, au dessus de la cathédrale d’Aix, pour s’y construire un atelier qui deviendra son dernier espace de création à partir de 1902.
Entre 1902 et 1906, Paul Cézanne dispose alors d’un atelier construit à sa demande, selon ses plans, en un lieu choisi par lui sur la colline des Lauves, qu’il qualifie « de grand atelier à la campagne ». De l’atelier, on domine Aix et sur la colline au dessus de l’atelier, on voit la montagne Sainte-Victoire au lieu dit « la terrasse des peintres » : Cézanne va peindre là ses dernières « MontagneSainte-Victoire« .
DAVID KIRCHTALER Chargé des opérations monuments historiques
Le jardin de l’atelier des Lauves.
L’atelier des Lauves.
Façade de l’Atelier des Lauves.
Dans l’atelier.
Cézanne, qui disait en 1866 qu’il fallait sortir de l’atelier, (« tous les tableaux faits à l’intérieur, dans l’atelier, ne vaudront jamais les choses faites en plein air ») y revient délibérément dans ce nouveau lieu de création, certain qu’avec lui son travail « sur nature » s’en trouverait accru. Il y poursuit en tout cas ses études : « Je dois travailler six mois encore à la toile que j’ai commencée. » écrit-il à Gasquet en septembre 1903. On peut imaginer qu’il s’agit d’une version des Grandes Baigneuses qui ne seront jamais achevées. Si le peintre préserva sa solitude pour l’unique réalisation de sa vie, la peinture (« La peinture est ce qui me vaut le mieux » lettre à son fils 26 août 1906), il n’en reçut pas moins avec affabilité et attention les amis et admirateurs. » L’œuvre ultime s’accomplit dans le recueillement et le silence. Cézanne peint quelques natures mortes et autres tableaux… C’est dans l’atelier des Lauves qu’il poursuivra le travail sur ses Grandes Baigneuses (visibles aujourd’hui à la Barnes Foundation de Philadelphie), le tableau qu’il avait commencé au Jas de Bouffan, et jamais achevé.
Paul Cézanne dans son atelier.
Paul Cézanne : « Les baigneuses ».Croquis.
On dit que Cézanne s’était juré de mourir en peignant. Il y est presque parvenu… Le 15 octobre 1906, non loin de la route du Tholonet qu’il parcourait à l’adolescence avec Émile Zola, le peintre est surpris par un orage alors qu’il travaille sur un paysage. Il s’obstine, malgré la pluie torrentielle, et s’évanouit. Un homme le découvre inconscient et le ramène chez lui sur une charrette.
Le lendemain, il se rend malgré tout dans son atelier, bien décidé à finir le portrait de son jardinier Vallier. Il fait un nouveau malaise et succombe à une vilaine pleurésie, le 23 octobre 1906, à l’âge de 67 ans. Paul Cézanne repose au cimetière Saint-Pierre d’Aix-en-Provence. La ville de cœur d’un génie intemporel.
Paul Cézanne : « Le jardinier Vallier ». 1906.
Paul Cézanne sortant de l’atelier des Lauves. peut-être pour s’installer sur sa terrasse et regarder la Sainte-Victoire 🙂
Le MUSÉE GRANET :
Entrée du Musée Granet.
Pour cet événement « Cézanne 2025 », le musée Granet a fait le choix d’exposer des oeuvres de Paul Cézanne réalisées au Jas de Bouffan, sa maison natale que vous venez de découvrir !
Une grande part est laissée au fameux grand salon de la bastide du Jas de Bouffan que Cézanne a utilisé comme terrain d’expérimentation artistique. Dans un premier temps, il couvrira les murs de paysages puis peindra « Les quatre saisons » en les signant « Ingres » (?) et au centre desquelles il positionne le portrait de son père… Il fera des ajouts, recouvrira, repeindra etc. Il se cherche et surtout affirme son regard et sa ténacité à faire vivre son art. Ces tatonnements, hésitations, retours en arrière, effacements… Vont lui permettre de décider de son style et le propulse parmi les peintres les plus connus, alors même qu’en France il ne sera pas vraiment reconnu ! Un grand chantier de restauration du Jas de Bouffan, en 2023, a permis l’étude de ces panneaux muraux, et très récemment, de nouvelles fresques ont retrouvées qui seront étudiées de près dès la fin des expositions. Les conditions de préservation n’étant pas optimum au Jas de Bouffan(problèmes de températures, d’hygrométrie et de sécurité..) les peintures du Grand Salon sont exposées au musée et, comme vous l’avez vu, une reconstitution vidéo est proposée au Jas.
Dépose des peintures du Grand Salon.
Reconstitution du Grand Salon du Jas de Bouffan au Musée Granet.
L’autre thématique développée dans l’exposition est le portrait. Cézanne s’exercera au portrait avec ardeur en captant les proches venus en visite au Jas…
Une salle des portraits.
Cézanne: » Portrait d’Émile Zola ».
Cézanne : » Portrait d’Anthony Valabrègue » 1870
Au détour d’une salle, on aperçoit un curieux assemblage de portraits : il s’agit des portraits de sa mère et de sa soeur peints recto et verso et tête bêche :
Portrait de Marie Cézanne, soeur de l’artiste. 1866
Portrait de la mère de Cézanne. 1866
Parmi ces portraits, on découvre de nombreux autoportraits… Comme pour guider le visiteur, ils sont placés par ordre chronologique dans chaque salle, pour montrer le regard que l’artiste porte sur lui-même…
Autoportrait sur fond rose . 1875.
Autoportrait. 1878-1880.
Cézanne aimait aussi peindre les « gens du peuple » qui l’entouraient.. Le jardinier Vallier ou des anonymes comme des paysans, des joueurs de cartes, des femmes…
Cézanne: « Les joueurs de cartes. » 1893-1896.
Détail des joueurs de cartes.
Cézanne : « l’homme qui fume » étude au crayon pour « Les joueurs de cartes ».
Cézanne : « L’homme en blouse bleue ».1896-1897.
En 2013, Bruno ELY, actuel Directeur et Conservateur du musée Granet, racontait avec passion son coup de coeur pour un portrait peint par Cézanne : « La femme à la cafetière » (1890) Il explique là comment on peut déceler dans ce portrait les débuts de la peinture moderne :
Le Jas de Bouffan, c’est aussi pour Paul Cézanne l’apprentissage du paysage et des natures mortes. Inlassablement l’artiste saisit les formes, les couleurs et organise la composition de ses tableaux en cherchant le meilleur équilibre… Alignements d’arbres, éclats de touches de couleurs, objets aux seconds plans…
« Dans le peintre il y a deux choses : l’oeil et le cerveau, tous deux doivent s’entraider ; il faut travailler à leur développement mutuel ; à l’oeil par sa vision de la nature ; au cerveau par la logique des sensations organisées (…) L’oeil doit concentrer, englober, le cerveau formulera ». (In « Cézanne » de Joachim Gasquet. 1921)
Une salle des paysages.
Cézanne : « Environs du Jas de Bouffan » 1885-1887.Cézanne : « La montagne Ste Victoire » Collection Gurlitt.
Bruno ELY, directeur du musée GRANET, nous raconte la curieuse histoire de ce tableau de Cézanne, appelé : « La Montagne Ste Victoire de la Collection Gurlitt. » :
Une salle des natures mortes.
Cézanne : « Nature morte aux pommes et melons » 1895.
Cézanne : « Nature morte aux pommes » 1895-1898.
« Une autre section de l’exposition sera réservée aux Baigneurs et Baigneuses. Entre dessins, peintures et aquarelles, ce thème met en lumière les recherches sur la figure humaine dans l’œuvre de Cezanne. Nous y retrouvons à la fois l’inspiration liée au thème classique des bacchanales, ainsi que les recherches plus modernes sur les volumes. Dans ces compositions, l‘expression érotique s’intègre à la volonté du peintre d’exprimer des recherches purement plastiques. Les corps des baigneurs et des baigneuses ont des formes anatomiques irrégulières, qui s’intègrent dans le paysage environnant, sans jamais perdre leur caractère charnel. Ce thème a hanté Cezanne durant toute sa vie : il réalise autour de 200 compositions de baigneurs et baigneuses, parfois les laissant inachevées. Il est certain qu’il a élaboré ces compositions lentement, jusqu’à aboutir aux tableaux des Grandes Baigneuses. Certainement, il a commencé cette entreprise au Jas de Bouffan pour la poursuivre, sans jamais l’achever, à l’atelier des Lauves pendant les dernières années de sa vie. » (Extrait du Dossier de Presse)
Cézanne : « Baigneuses et baigneurs » 1899-1904.
Plusieurs tableaux des Baigneuses…
Avant de quitter Aix en Provence, des couleurs plein les yeux et le chant des cigales qui nous accompagne sur ce départ… Nous avons voulu savoir comment on prépare un tel événement… Johan KRAFT Responsable de la Communication du musée Granet a bien voulu se prêter au jeu de nos questions :
Johan KRAFT Photo : (c) Melania Avanzato
PRENONS LE TEMPS D’ÉCOUTER RADIO CLASSIQUE QUI NOUS OFFRE LE RÉCIT D’UNE AMITIÉ :
Magnifique hommage…
« Cézanne peint » de Michel Berger. Interprété par France Gall. 1985.
– « Le Paris d’Agnès Varda de-ci, de-là » au musée Carnavalet à Paris Jusqu’au 24 Août 2025.
– « Je suis curieuse. Point. » au musée Soulages à Rodez Jusqu’au 4 janvier 2026.
Peut-être pensez-vous connaître Agnès Varda ? Peut-être ne la connaissez-vous pas ? Ces deux expositions, d’un bout à l’autre de la France, vous feront découvrir le génie inventif de cette grande artiste !
« Née le 30 mai 1928 à Bruxelles, Agnès Varda passe son enfance à Sète dans l’Hérault, puis étudie la photographie et l’histoire de l’art à Paris. Amie d’enfance de l’épouse de Jean Vilar, elle devient photographe du TNP (Théâtre National Populaire à Paris), enregistrant tout, des maquettes audio aux répétitions et aux spectacles, de 1951 à 1961. Ses photos de Gérard Philipe feront le tour du monde et fourniront la matière d’une magnifique exposition au festival d’Avignon de 2007. Mais, voulant se mesurer au mouvement et à la parole, elle conçoit toute seule à vingt-cinq ans et réalise, sans expérience cinématographique, un long-métrage, « La Pointe courte ». Remarqué en marge du festival de Cannes 1955, le film fait de cette jeune femme cinéaste une pionnière bientôt internationalement reconnue et lui permet de réaliser trois courts-métrages. Elle se retrouve bientôt plongée dans le bouillonnement créatif et critique qui annonce la « nouvelle vague » et rencontre Jacques Demy, son futur époux.
(…) À partir de là, Agnès Varda va édifier une œuvre inclassable et abondante dont la singularité réside dans l’exercice d’une marginalité assumée, indissociable de son existence même. Sa création s’investit d’abord dans la photographie, puis des films et enfin des installations d’artiste. Mais c’est l’intelligente complexité de son cinéma qui fonde la cohérence de son triptyque de vie, articulant sa curiosité et sa passion tant pour les arts (classiques et contre-culture) que pour les gens. » Extrait de l’Encyclopédia Universalis.
Lors du vernissage de l’exposition « Je suis curieuse. Point. » au musée Soulages, Rosalie Varda, la fille d’Agnès Varda, nous parle de sa mère…
Rosalie Varda devant une photo de sa mère au musée Soulages à Rodez.
interview de Rosalie Varda
– LE PARIS D’AGNÈS VARDA. DE-CI, DE-LÀ » au musée Carnavalet à Paris
« Il m’est naturel d’aller de-ci, de-là, de dire quelque chose puis le contraire, et de me sentir moins piégée parce que je ne choisis pas une seule version des choses. »Agnès Varda
L’exposition met en valeur l’œuvre photographique encore méconnue de l’artiste et révèle la place primordiale de la cour-atelier de la rue Daguerre (Du nom d’un photographe!) à Paris, lieu de vie et de création, de 1951 à 2019. Elle montre l’importance de Paris dans une œuvre libre et foisonnante qui ne cède jamais à la facilité et fait merveilleusement dialoguer documentaire et fiction.
L’exposition s’appuie essentiellement sur le fonds photographique d’Agnès Varda et met en regard l’œuvre de Varda photographe avec celle de Varda cinéaste à travers un ensemble de 130 tirages, dont de nombreux inédits, et des extraits de films entièrement ou en partie tournés à Paris. Elle présente également des publications, des documents, des objets ayant appartenu à l’artiste, des affiches, des photographies de tournage ainsi qu’une sculpture de sa chatte Nini.
« Nini »
Après avoir révélé les premiers pas d’Agnès Varda comme photographe, le parcours propose une première immersion dans la cour-atelier, à l’époque où elle est à la fois un studio de prise de vue, un laboratoire de développement et de tirages et le lieu de sa première exposition personnelle en 1954.
« Le photographe photographié ». Une facétie d’Agnès Varda :
Scène 1 : Agnès Varda sort de son atelier rue Daguerre à Paris…
Scène 2 : Elle installe son appareil photo dans la rue…
Scène 3 : puis son modèle… Le photographe Brassaï !
Plaque à l’effigie d’A.Varda installée ds la cour de l’atelier. 1952
L’atelier de la rue Daguerre.Reconstitution pour l’exposition.
Vient ensuite un ensemble de photographies qui soulignent le regard décalé, teinté d’humour et d’étrangeté que l’artiste porte sur les gens et les rues de la capitale. Agnès Varda a en effet répondu à de nombreuses commandes, notamment de portraits mais aussi de reportages, traités à sa façon, avec originalité. De son passage au Théâtre National Populaire (TNP) on admirera de très beaux portraits de comédiennes, comédiens, metteurs en scène… On découvre aussi les photos « de commande » pour des journaux, pubs etc.
Gerard Philipe ( « Le Cid »)Ascenseur du TNP . 1952
Jean Vilar, directeur du TNP. 1952
Giuletta Masina en 1956. (Interprête du film de Fellini : « La strada » dans le rôle de Gelsomina)
Federico Fellini Porte de Vanves à Paris en 1956
Une salle de l’exposition.
« Le dépôt de Paris-Ivry » pour « La vie du Rail » .1951.
Le regard de la cinéaste sur Paris est évoqué dans un parcours chrono- thématique mettant en valeur les films tournés entièrement à Paris à commencer par Cléo de 5 à 7 (1962). un extrait du court-métrage Les fiancés du pont MacDonald (1962) et des photographies de tournage de Loin du Vietnam (1967). À travers une sélection d’extraits de longs et courts métrages, certains inédits ou inachevés, l’exposition interroge également la façon dont la caméra d’Agnès Varda explore la ville et montre sa passion pour les détails urbains, invisibles pour des yeux pressés.
« Cléo de 5 à 7 » (Séquence des fiancés du pont Mc Donald) A.Varda 1961.
Photographies du tournage de « Cléo de 5 à 7 » Photos de Liliane de Kermadec
Spot d’information sur la contraception et l’avortement. Commande du Ministère de la Santé. 1981.
Agnès Varda et Gisèle Halimi. 1981.
L’exposition se poursuit avec des thématiques chères à l’artiste comme son attention aux gens et plus particulièrement aux femmes et à ceux qui vivent en marge en tissant à chaque fois des liens entre l’œuvre de la photographe et de la cinéaste. Pour le film L’une chante l’autre pas (1977), qui raconte l’émancipation de deux femmes qui gagnent en liberté et vérité, Agnès Varda a reconstitué la boutique d’un photographe parisien. Pour ce faire, elle a réalisé une série de portraits féminins dont 12 seront exceptionnellement remis en scène dans le parcours. Elle présente également des extraits de Daguerréotypes (1975), documentaire tourné rue Daguerre dans lequel Agnès Varda réalise un ensemble de portraits de ses voisins commerçants.
L’exposition s’achève autour de portraits de l’artiste photographiée et filmée dans sa cour-atelier devenue cour-jardin, à partir de laquelle elle a fait rayonner son œuvre tout en cultivant un personnage haut en couleur.
– « AGNÈS VARDA JE SUIS CURIEUSE. POINT. » AU MUSÉE SOULAGES à RODEZ
Après la densité créatrice d’Agnès Varda au musée Carnavalet, le musée Soulages à Rodez propose une exposition lumineuse sur la période méditerranéenne de l’artiste. Pierre Soulages et Agnès Varda se connaissaient et partageaient cet amour de la région sétoise. Photos, installations, films … Témoignent de son – de leur – attachement à Sète et à toute la côte !
Deux tableaux de Pierre Soulages en regard de photos d’Agnès Varda ouvrent l’exposition…
Le titre « JE SUIS CURIEUSE. POINT » prend ici tout son sens, tant on sent l’artiste portée par sa curiosité des gens, des lieux, des savoir-faire, des effets de lumière sur les pellicules… Elle capte méticuleusement les moments de vie, les sourires ou la gravité d’un regard. Un grand espace est consacré au film « La pointe courte » (dunom d’unquartier de pêcheurs de Sète) : photos, installations, vidéos… On y découvre aussi le film « Le Bonheur » réalisé en 1965, Un hommage au sculpteur Calder, Les cabanes de l’île de Noirmoutier : La mer bien sûr… Changeante et généreuse comme elle,
Agnès Varda : « Autoportrait sur un bateau » 1950.
« La mer, la mer, toujours recommencée »….. d’A.Varda
A.Varda : Marins du quartier de la pointe courte, futurs « acteurs » du film.
A.Varda : « Nature morte à la pointe courte » .1953.
A.Varda : vues du quartier de la pointe courte.
A.Varda : « Bois. La pointe courte » 1952.
Sylvia Montfort et Philippe Noiret sur le tournage du film « La Pointe Courte »
La Cité de l’Architecture et du Patrimoine nous propose une exposition époustouflante sur le mur de Berlin, jusqu’au 28 septembre.
LE PLUS GRAND SYMBOLE DE DIVISION DE L’HISTOIRE
Dès que l’on pénètre dans l’exposition, on est littéralement happé par l’Histoire. La scénographie nous emmène à travers les méandres d’un après-guerre où les tensions entre les différents protagonistes sont attisées par des intérêts économiques, stratégiques et par les ambitions personnelles de dirigeants qui, au lendemain d’une guerre effroyable qui a vu l’extermination de dizaines de millions de personnes derrière des camps cernés de barbelés, ressortent ces mêmes barbelés pour couper une ville – et ses habitant.es – en deux !
« Il est impossible de comprendre l’histoire du XXe siècle sans la confrontation philosophique, idéologique et géopolitique symbolisée par le Mur de Berlin. Racontée dans toute sa complexité, l’exposition montre l’histoire de la répression exercée par le régime communiste de l’ancienne République Démocratique Allemande( RDA), mais aussi des exemples inspirants de citoyens ordinaires dans leur lutte pour la liberté, la démocratie et les droits de l’homme. Plus de 30 ans après sa chute, son histoire nous rappelle avec force la nécessité de protéger et de préserver, face aux défis nouveaux et anciens, nos démocraties, qui constituent la meilleure voie vers une coexistence pacifique. » Luis Ferrero ( Directeur de la société espagnole Musealia co-auteure de l’exposition)
L’exposition « Le mur de Berlin Un monde divisé » raconte l’histoire du Mur de Berlin dans le contexte de la guerre froide et décrypte deux visions radicalement différentes de l’organisation de la société, dans un contexte de menace constante de guerre nucléaire. Elle vise à encourager l’esprit critique de ses visiteurs : à quoi ressemblait la vie dans ces régimes très différents ? Pourquoi tant de gens ont-ils tenté de fuir le régime communiste de l’Allemagne de l’Est, ce qui a conduit à la construction d’un mur ? Pourquoi les promesses de l’Allemagne de l’Ouest étaient- elles si attrayantes que les citoyens étaient prêts à risquer leur vie pour franchir cette barrière ?
Divisée en quatre zones, l’exposition a été conçue pour être visitée avec un audioguide individuel, qui fournit des informations supplémentaires grâce à une narration soigneusement élaborée. Une expérience complète qui offre un regard global sur les faits historiques. Des documents simples de compréhension : cartes de répartition, films et objets … Même un fragment original du Mur, long de 10 mêtres, retracent la naissance de cette aberration que fut la construction du Mur de Berlin.
UN MONDE DIVISÉ
Plongée dans le contexte de l’Europe de l’après-Seconde Guerre mondiale : comment les pays les plus puissants du moment, les États-Unis et l’Union Soviétique, ont conduit à la guerre froide en s’affrontant sur l’organisation de la réalité économique et sociale.
AVANT LE MUR
Cet espace explique la concurrence et les tensions politiques croissantes à Berlin. Dans une ville dont les frontières étaient ouvertes entre les deux systèmes hostiles, cela a créé un état de crise permanent et une expérience d’insécurité qui a abouti à la construction du Mur en 1961.
Fin symbolique de l’ère nazie.
DIVISER ET VIVRE AVEC LE MUR
Le Mur a causé de terribles souffrances aux Berlinois en détruisant brutalement les liens sociaux avec l’autre moitié de la ville. Cette zone aborde les histoires les plus personnelles des personnes qui ont affronté le Mur et montre également le contexte mondial dans lequel s’est déroulée la guerre froide.
LA TRANSFORMATION MONDIALE ET LA FIN DE LA GUERRE FROIDE
Cette section présente le dénouement de la guerre froide, dont le Mur de Berlin est la représentation symbolique. Tandis que les Berlinois s’habituent à la division et au Mur, le monde se transforme et les attitudes à l’égard de la culture et de la politique ont changé dans le monde entier. L’agitation populaire et les révolutions ont finalement fait tomber les dictats socialistes et, avec eux, le Mur.
Salle de l’exposition sur : « Le monde en mutation«
Carousel des « révolutions » qui secouèrent l’Europe de l’Est.
Banderole de « Solidarnosc » (« solidarités »), fédération de syndicats polonais (1980)
Mur d’écriture en fin d’exposition.
Comment ne pas voir dans ces pages d’histoire une nauséeuse ressemblance avec les tensions actuelles ?
La chute….
La chute du mur… Film diffusé dans l’exposition.
Au lendemain de la chute du mur, le violoncelliste Mstislav Rostropovich est venu jouer devant les ruines :
L’exposition : « Le mur de Berlin Un monde divisé » est présentée à la Cité de L’Architecture et du Patrimoine 1 Place du Trocadéro à Paris.