LA MAGIE DE GIVERNY

Claude Monet dans son jardin de Giverny
Photo de Sacha Guitry en 1913 (c) Fondation C.Monet

Ce jour-là il tombait une douce pluie de printemps et les jardins scintillaient de perles d’eau… Cette luminosité particulière avait du charmer Claude Monet, quand il s’installa à Giverny en 1883 et déclencher sa passion du jardinage!
Le Clos Normand d’abord, puis à partir de 1890, le Jardin d’Eau, témoigneront de son engouement pour les plantes mais aussi pour leur « mise en scène » où il révélera une extrême originalité, réalisant deux jardins qui ne ressembleront à nul autre. S’entourant des conseils avisés d’un Georges Truffaut, échangeant ses expériences avec ses amis Gustave Caillebotte ou Octave Mirbeau, tous deux habiles jardiniers, fervent lecteur des catalogues des pépiniéristes, courant les expositions de plantes et les jardins botaniques, Claude Monet invente des jardins qui évoquent sa peinture, toujours en mouvement, où la lumière révèle les couleurs en vibrations continuelles.
Peu à peu abandonnés à la mort du peintre, les jardins seront restaurés à partir de 1977 avant d’être ouverts au public le 1er juin 1980.

Nénuphars du jardin d’eau . Giverny.
Photo (c) fondation C.Monet
« Nymphéas bleus »
C.Monet.Musée d’Orsay. 1916/1919

La visite commence par la grande maison qui abrita la nombreuse famille recomposée , lui même ayant eu deux fils et sa seconde épouse six enfants!
Restaurée entre 1977 et 1980, la maison restitue méticuleusement l’ambiance du lieu de vie que s’était aménagé le peintre…
Les tableaux et les nombreuses estampes japonaises – passion de Monet – sont, bien entendu, des copies et je n’ai pas réussi à savoir où étaient tenus les originaux 🙂
La salle à manger et la cuisine sont assez incroyables: jaunes et bleus pétants, figés comme un décor, où les ravissants bouquets de fleurs imaginés par l’équipe de jardiniers et renouvelés au fil des saisons, soufflent un peu de vie.

Détail de la cuisine Photo: (c) Kadia Rachedi.
Salon. Photo (c) Kadia Rachedi

Descendons au jardin…

Vers le jardin… Photo: (c) Kadia Rachedi

Quel serait le sentiment de Claude Monet s’il découvrait, aujourd’hui, ses jardins ? Peut-être aurait-il la sensation qu’ils n’ont cessé de l’attendre tels qu’il les avait laissés. Il verrait une dizaine de jardiniers s’activer aux mêmes tâches que ceux de son époque, et puis, selon les saisons il retrouverait ses chères plantes associées en fonction de leurs coloris, il irait jusqu’à son jardin d’eau, franchirait le pont japonais et revivrait, sans doute, l’émotion procurée par les mêmes jeux de lumière qui l’avaient tant fasciné.
Au fil des saisons les couleurs s’épanouissent, se répondent dans ce jardin lumineux et si reposant que l’on aimerait s’y laisser enfermer pour le regarder s’endormir et s’éveiller dans la rosée!

le Jardin, la maison et les serres
Photos: (c) Kadia Rachedi
Jardin d’eau . Photo: (c) Kadia Rachedi
et (c) Fondation C.Monet

Photo: (c) Fondation C.Monet
Photo (c) Kadia Rachedi
QUI MIEUX QUE LES JARDINIERS POURRAIENT VOUS PARLER DES JARDINS DE CLAUDE MONET?
Remi LECOUTRE Chef jardinier adjoint
Photo (c) Kadia Rachedi

DIALOGUE AFRICAIN À L’ABBAYE DE FONFROIDE

OUSMANE SOW et FREDDY TSIMBA,

PORTEURS DE VIES

Dans le cadre imposant de l’Abbaye de Fonfroide, près de Narbonne dans l’Aude, vous pourrez admirer jusqu’au mois d’octobre 2021, une exposition particulièrement saisissante en hommage à Ousmane Sow: trois de ses oeuvres – dont deux inédites – auxquelles répond une grande oeuvre de Freddy Tsimba.
Dans l’église de l’Abbaye, les visiteurs pourront admirer le Nouba qui se maquille, Saint Jean-Baptiste et une œuvre en bronze : La mère et l’enfant.
Le côté apaisant et calme de ce pur joyau architectural permet réellement d’apprécier ces oeuvres d’Ousmane Sow et la grande cour carrée de l’Abbaye accueille judicieusement la sculpture écho de Freddy Tsimba entièrement réalisée avec des pièges à souris ouverts!

« La mère et l’enfant » et « Le Nouba qui se maquille » Ousmane Sow.
Photo:(c) Sylvie Maugis
« Le Nouba qui se maquille » Détails.
« La mère et l’enfant »
Photos: (c) Sylvie Maugis
Photos: (c) Sylvie Maugis
« St Jean Baptiste » Ousmane Sow.
Photo: (c) Sylvie Maugis
Feddy Tsimba à Fonfroide

Freddy Tsimba, artiste Congolais né en 1967, fut accueilli en résidence à l’Abbaye de Fonfroide en Septembre 2020 et y réalisa une œuvre en écho à un ensemble de sculptures d’Ousmane Sow.
« Ma vraie école, même si j’ai fait les Beaux-Arts de Kinshasa, c’est la rue où je me fournis en abondance. Mes maîtres ont été les forgerons auprès desquels pendant 5 ans j’ai appris la technique du feu et de la soudure.
Ma force me vient de mes œuvres. Je ne suis pas là pour séduire, je suis là pour témoigner.
Pour réaliser mes sculptures, je risque ma peau et elle n’a pas de prix. J’ai récupéré dix mille cartouches dans des zones difficiles pour réaliser mes sculptures mais combien en reste-t-il ? Des tonnes ! Et elles sont porteuses de l’histoire tragique de mon pays. Mon but n’est pas de faire un travail pour plaire à un groupe de gens qui ont de l’argent ! Ce serait me trahir. Est-ce que réellement l’artiste doit plaire ? S’il plait tant mieux mais s’il ne plaît pas et qu’il est dans le vrai, tant mieux aussi ! »

L’exposition est organisée dans le cadre d’IN SITU Patrimoine et Art Contemporain en Occitanie, portée par l’association Le Passe Muraille.

Sculpture hommage à Ousmane Sow
de Freddy Tsimba.
Photo: (c) Sylvie Maugis

Écoutez voir!

Quelques mots

sur cette abbaye…

L’abbaye de Fonfroide. Le cloître
Photo: (c) Sylvie Maugis

L’abbaye de Fontfroide est fondée en 1093, au cœur des Corbières.
En 1145, la communauté rejoint l’ordre de Cîteaux et ne cesse de se développer jusqu’au XIVème siècle. Au cours de cette période, devenant l’une des abbayes les plus puissantes en Europe, elle joue un rôle crucial lors de la Croisade contre les Albigeois. Un lent déclin s’installe ensuite. Après le dernier départ des moines en 1901, Gustave et Madeleine Fayet
rachètent Fontfroide aux enchères en 1908.
Des artistes, appelés les « fontfroidiens », participent alors à la renaissance et à l’art de Fontfroide, parmi eux Odilon Redon, Richard Burgsthal et de nombreux amis de Pablo Picasso dont Déodat de Séverac, Ricardo Viñes, Aristide Maillol, Manolo Hugue… Créant en ce lieu une forme de “Villa Medicis” particulière. L’abbaye de Fontfroide est empreinte en ses murs de riches témoignages de ces résidences, dont le monumental triptyque d’Odilon Redon “le Jour, la Nuit et le Silence” ( malheureusement non visible du public!) ainsi que les vitraux de Richard Burgsthal.

Vitrail de Richard Burgsthal.
Photo: (c) Sylvie Maugis

Avant de quitter ces lieux magiques, il faut s’arrêter dans la « Chapelle des Morts » pour faire connaissance avec l’artiste coréen Kim En Jong, qui réalisa en 2009 les vitraux et le tableau qui ornent cette chapelle.

Vitrail de Kim En Jong
Photo:(c) Sylvie Maugis
Tableau de Kim En Jong
Photo:(c) Sylvie Maugis
ABBAYE DE FONFROIDE
ROUTE DÉPARTEMENTALE 613
11000 NARBONNE

www.fonfroide.com

IMPRESSIONS D’AUVERS…

Exposition « Vision impressionniste » au Château d’Auvers-sur-Oise. Photo: (c) Kadia RACHEDI

À Auvers-sur-Oise, on vit Van Gogh, on respire Van Gogh, on pense Van Gogh…
Chaque lieu qui fut fréquenté par le peintre, pendant les 60 jours où il y vécut avant d’y mourir, est soigneusement « ripoliné »: comme au cimetière où le mur semble neuf et où la pierre tombale de Vincent est nettoyée, (mais pas celle de Théo son frère!) ou dans sa chambre où la chaise en bois est disposée « comme dans un tableau » …

Tombes de Vincent et Théo Van Gogh
Cimetière d’Auvers-sur-Oise
Photo: (c) Sylvie Maugis
« La chaise et la pipe »
Van Gogh à Arles.
Chambre de Van Gogh à Auvers s/Oise

… On en oublierait presque les autres peintres qui y séjournèrent comme Daubigny ou Pissaro…
… Et on en oublierait aussi de regarder la ville: quel visiteur entre dans l’église, plutôt que juste la regarder de l’extérieur pour y trouver les similitudes avec l’oeuvre du peintre?
Construite au XI° siècle, elle allie art roman tardif et art gothique et mérite vraiment de s’y attarder, et mériterait aussi une petite rénovation !

Intérieur de l’église N-D de l’Assomption à Auvers-sur-Oise.
Photo:(c) Sylvie Maugis

Un grand nombre de sites et blogs de voyage vous permettront de tracer votre promenade à Auvers-sur-Oise, pour un jour ou plusieurs, soit sur « les pas de Vincent  » ou bien vers des endroits plus secrets comme les vestiges médiévaux, les bords de l’Oise ou les galeries contemporaines.

LE CHÂTEAU D’AUVERS

Façade du Château d’Auvers. Photo: (c) Kadia RACHEDI

Pour ma part je voudrais vous emmener au Château d’Auvers.
Depuis sa rénovation en 2017, le Château d’Auvers propose une installation audiovisuelle dynamique:

« Vision impressionniste, naissance et descendances »

Ce parcours est une approche pédagogique très réussie des périodes impressionnistes, pré et post-impressionnistes grâce à des projections animées autour des tableaux « repères » de ces moments de l’histoire de l’Art.
Des extraits de correspondances des peintres et de leurs proches, lus par Jacques Gamblin, ponctuent la visite et nous font partager leurs recherches, leurs questionnements et leurs réflexions sur la création.
On y apprendra que le photographe Nadar aurait dit devant un tableau:
« je suis impressionné! » et que cette exclamation a donné naissance au mot « impressionniste ».
Durant la déambulation à travers une dizaine de salles, le public se familiarisera avec l’évolution d’un courant artistique essentiel pour l’émergence de l’Art contemporain et ses influences sur les mouvements artistiques postérieurs tels que le pré-cubisme, le fauvisme, ou encore l’abstraction.
Les aménagements et la scénographie conçus par OMEO — Ysabel Sequeira intègrent des technologies sons et lumières innovantes.

Ces expositions ludiques sont importantes car elles permettent à un public « non initié » de faire connaissance avec l’Histoire de l’Art et peut-être aiguiser sa curiosité pour aller vers d’autres propositions culturelles…

« Tout ce qui travaille à la Culture travaille aussi contre la guerre »
Sigmund Freud

Photos de « Vision Impressionniste »:
(c) KADIA RACHEDI et SYLVIE MAUGIS

PODCAST

Delphine TRAVERS
Directrice du Château d’Auvers
Photo: (c) Sylvie Maugis

Passionnée et pétillante, Delphine Travers, Directrice du Château d’Auvers, a bien voulu répondre aux questions du Curieux:

Le Nymphée. Château d’Auvers. Photo: (c) Kadia Rachedi

Le Château d’Auvers recèle d’autres trésors comme les somptueux jardins et ce « Nymphée » de pierres et de coquillages.
Dans l’antiquité grecque, le nymphée est un bassin recueillant l’eau d’une source sacrée et par extension le temple destiné à la protéger et à recevoir des offrandes. Ces lieux de culte étaient consacrés aux nymphes, divinités féminines de la nature, qui peuplaient les forêts, les montagnes, les sources et auxquelles on attribuait un pouvoir fertilisant et nourricier.
Au XVIe siècle, en Italie, puis en France, la Renaissance redécouvre l’Antiquité. Parcs et jardins s’ornent de grottes artificielles et de salles fraîches décorées de statues et animées par des jeux d’eau. Cette tradition perdurera jusqu’au XVIIIe siècle.

Sur le site du château vous retrouverez toutes les propositions culturelles de cet été: ateliers de pratiques artistiques, animations enfants, concerts, expositions, rencontres…
www.chateau-auvers.fr

La minute cinéphile du Curieux…

Nous ne quitterons pas Auvers-sur-Oise sans rendre hommage à Kirk Douglas, interprète majestueux du film de Vincente Minelli: « Lust for life »
(« Envie de vivre ») sorti en France en 1956 sous le titre:
« La vie passionnée de Vincent Van Gogh ».
Le film fut intégralement tourné à Auvers en 1955 avec la participation des habitants / figurants et reste un souvenir vivace dans le coeur des auversois, tant la gentillesse de l’acteur a charmé le village! Et Kirk Douglas, peu avant sa disparition, avait d’ailleurs tenu à revenir à Auvers…

Kirk Douglas en 1955, devant la tombe des frères Van Gogh à Auvers.

Anthony Quinn (Gauguin) et Kirk Douglas (Van Gogh) dans une scène de
« La vie passionnée de Vincent Van Gogh »

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« Nous vous aimons MADAME »


SIMONE VEIL 1927-2017

J’avais tout juste 19 ans.
Une adolescence protégée et la connaissance des réseaux militants m’avaient permis de prendre la pillule contraceptive sans autorisation parentale.
J’avais ainsi pu échapper au périple angoissant de l’avortement clandestin en Angleterre, et participé aux caisses de soutien financier pour permettre aux copines de refuser une grossesse trop précoce et non désirée…
… Et j’entends encore résonner cette voix tendue et pourtant claire et décidée, qui s’adresse à l’Assemblée Nationale à majorité masculine:

Simone Veil, Ministre de la Santé. Novembre 1974. Assemblée Nationale


Tour à tour enthousiastes ou écoeuré.e.s ils et elles finissent par voter la loi sur l’autorisation de l’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG).
Simone Veil recevra des milliers de lettres d’injures, certaines la comparant aux « kapos nazis »
À elle qui avait été déportée dans les camps de la mort et y avait perdu père, mère et frère…
« Je ne mesurais pas la haine terrible que j’allais susciter » avait-elle dit.

L’exposition « Nous vous aimons, MADAME. Simone Veil 1927-2017 » retrace la vie de Simone Veil, son enfance, la déportation, puis ses études de magistrate, ses nominations et ses prises de position politiques et idéologiques.
Tour à tour émue, admirative puis interrogative face à ce parcours, j’ai été happée par cette lumineuse exposition richement documentée, et j’étais heureuse d’y avoir cotoyé un public jeune et mixte, visiblement passionné!

Exposition à l’Hôtel de Ville de Paris, jusqu’au 21 août 2021
Entrée libre sur inscription : https://quefaire.paris.fr/simoneveil
À NE MANQUER SOUS AUCUN PRÉTEXTE!

Art aborigène contemporain


au Musée Paul Valéry à Sète.

C’est toujours avec une réelle jubilation que je vais voir une exposition au musée Paul Valéry à Sète ( Hérault).
Ce musée est lumineux et les oeuvres exposées, quelles qu’elles soient, y pétillent!

Cet été, c’est une exposition très intrigante que vous allez pouvoir admirer: la collection d’art contemporain aborigène de Pierre Montagne.
70 oeuvres de 63 artistes sont accrochées au premier étage, ponctuées de panneaux informatifs clairs et très réussis.
Une importance particulière est accordée à un mouvement apparu dans les années 70, dans la communauté aborigène de Papunya, en Australie.

Une salle de l’exposition « Art aborigène ». Photo: (c) Sylvie Maugis
Panneau explicatif sur les symboles utilisés par les artistes aborigènes. Photo: (c) Sylvie Maugis

Mes nombreux séjours au Canada m’ont permis de voir quelques belles expositions d’art contemporain aborigène au Musée des Beaux-Arts d’Ottawa… Mais j’avoue mal connaître ces mouvements artistiques!
L’Art Aborigène est très mal connu également dans tout le sud de l’Europe, ce qui a présidé au choix du Musée de le faire connaître à travers cette exposition.

Qui sont les Aborigènes d’Australie ?

« Premiers hommes à avoir occupé le sol australien, les Aborigènes sont les autochtones de l’île-continent depuis au moins 40.000 ans.
Durant des millénaires, ces multiples tribus semi-nomades ont développé en autarcie une culture qui leur est propre, jusqu’au débarquement des colons occidentaux à la fin du XVIIIe siècle.
« A l’arrivée des colons anglais, les Aborigènes (…) se déplaçaient au sein de larges territoires, explique la spécialiste de l’Australie Maïa Ponsonnet1. Ils vivaient de chasse, de cueillette et de pêche en groupe d’une à quelques dizaines de familles. La fréquence de leurs déplacements et leur ampleur variaient selon les régions, car elles dépendaient largement des ressources en eau et en nourriture. »
Selon un recensement en 2011, il y aurait 670.000 indigènes en Australie, ce qui représenterait 3% de la population.

La culture aborigène
La tradition aborigène s’appuie sur une spiritualité liée à la terre, au paysage, la renvoyant à l’aube de la création du monde.
Beaucoup de groupes aborigènes estiment qu’au temps des origines la Terre a été le théâtre d’événements cosmologiques au cours desquels les ancêtres ont créé des paysages, les hommes, les divisions claniques, les rituels et la gestion foncière.
Selon les croyances des Aborigènes, rochers, collines, lacs portent l’empreinte laissée par les esprits créateurs. L’histoire de chaque ancêtre créateur s’inscrit dans un itinéraire géographique qui peut en croiser d’autres.
On traduit généralement cette philosophie religieuse par le « Temps du rêve ». Les cérémonies rituelles des aborigènes, chants, danses et peintures corporelles, maintiennent le lien entre le monde des vivants et celui des ancêtres : il s’agit de perpétuer les épisodes créateurs et les transmettre aux jeunes adultes.
Parmi les traits marquants de la culture aborigène, la peinture a une place importante qu’elle soit rupestre, sur sol, sur bois ou, plus récemment, sur tissus »
Extraits du site « terra australia » https://www.youtube.com/embed/VgfBmX5jbgc?feature=oembed

L’art aborigène contemporain porte une attention particulière à l’attachement au territoire, à sa lecture, à la préservation discrète des signes sacrés, camouflés derrière des points ou des pigments. Il a progressivement cédé la place à des œuvres innovantes. La grammaire picturale classique des rêves et représentations a progressivement offert de nouveaux terrains d’exploration et de créativité aux artistes grâce aux nouveaux supports (toile de lin, verre, bronze…) et matériaux (aquarelle, acrylique, film PVC pour protéger les pigments naturels des écorces peintes). L’époque contemporaine a favorisé la naissance d’individualité chez les artistes aborigènes. De nouveaux styles bien identifiables sont apparus. Contrairement au passé, à la lecture d’une toile il devient évident que celle-ci est l’œuvre de tel.le artiste ou de tel.le autre. Le marché de l’art mise sur ces individualités et invite les peintres à signer leurs créations.
Si l’art aborigène a permis de récupérer des terres hier, il s’avère aujourd’hui bien souvent comme un des seuls vecteurs naturels permettant aux jeunes générations de trouver une place dans la société. L’art fut hier un manifeste politique pour la reconnaissance des aborigènes, il devient presque aujourd’hui un passeport économique.

Dans l’exposition du Musée Paul Valéry, plusieurs communautés sont représentées: Terre d’Arnhem, regroupant 700 artistes, Désert central et occidental où nacquit l’art contemporain aborigène, l’Australie méridionale-Apy et l’Australie occidentale et Sud.

Katleen Petyarre 2015
Willy Muntjantji
Maringka Bake 2013
Edward Blitner 2015

J’ai noté que la majorité des oeuvres présentées ont été réalisées par des femmes. Interrogée à ce sujet, Maïthé Vallès-Bled, Directrice du musée Paul Valéry et Conservateur en chef du Patrimoine, m’a expliqué que, chez les aborigènes, il n’existait pas de discrimination « sexiste » quant à l’accès à l’art, que ce soit au niveau de la création qu’au niveau de la diffusion.

Si vos déplacements de l’été vous mènent dans l’Hérault, ne manquez sous aucun prétexte cette très belle exposition, jusqu’au 26 septembre!

Au rez de chaussée du Musée, vous pourrez également voir :
 » Retour au Musée avec Topolino », sympathique initiative d’un artiste sétois!

« Retour au musée de Topolino »
« 

LES PAPYRUS DU NIL

Quand j’ai reçu l’invitation pour visiter l’exposition du musée Granet à Aix en Provence:

« PHARAON, OSIRIS ET LA MOMIE »

j’ai eu un amusant flash-back: j’avais 11 ans à tout casser et j’avais réalisé un exposé sur l’Égypte, tapé à la machine à écrire sur de fines feuilles vert-pâle et illustré de quelques photos, le texte entièrement pompé dans un livre couverture imitation cuir et or qui faisait partie d’une collection que mes parents avaient souscrit en dix tomes, et que je viens de retrouver dans ma bibliothèque:
«  Histoire de la Civilisation / Notre héritage oriental » de W.Durant.
La très bonne note obtenue a failli m’entraîner vers une carrière d’égyptologue!
Je revois aussi l’extraordinaire exposition Toutânkhamon de 1967, vue par plus d’un million de visiteurs, qui m’a permis de voir des vestiges d’une beauté saisissante et qui résonnaient dans mon quotidien: représentations de la naissance et de la mort, du travail, images de femmes puissantes etc.

Affiche de l’exposition de 1967

L’histoire de la civilisation égyptienne fut, pour nous toutes et tous, la première réelle immersion dans l’Histoire avec un grand « H », les autres civilisations anciennes étudiées étant peu propices à l’identification et au rêve malgré les efforts de vulgarisation des lieux comme Tautavel, Lascaux ou le musée de Lodève…

« Chacun d’entre nous trouve dans l’évocation de l’Égypte ancienne quelque chose qui lui parle. Qui lui rappelle un moment de sa vie, une exposition visitée autrefois en famille, un cours d’histoire, un décor, un bijou, un roman, une BD, un péplum, et maintenant sans doute pour les plus jeunes un jeu vidéo. »
Extrait du Dossier de Presse.

L’ENGOUEMENT DU PUBLIC

La civilisation de l’Égypte ancienne continue à fasciner … Les expositions et les collections attirent un public nombreux et enthousiastes!

PODCAST:
J’ai eu le privilège de rencontrer Bruno ELY, Directeur du Musée Granet d’Aix en Provence et Conservateur du Patrimoine, qui a bien voulu nous éclairer sur cette attirance du public pour l’égyptologie:

Bruno Ely.
Photo: (c) « Made in Marseille »

Entrée de l’exposition. Photo:(c) Sylvie Maugis.

L’exposition bénéficie du soutien du Musée du Louvre: conçue par Christophe Barbotin, conservateur général au département des antiquités égyptiennes, elle accueille une quarantaine d’oeuvres prêtées par le musée parisien, comme le grand colosse de pharaon en granit rose ou le « Livre des Morts » de dix huit mètres de long. D’autres oeuvres proviennent des musées de Marseille, Avignon, Guéret, Lyon pour la France et Turin , Heidelberg et Leyde pour l’Europe. Et bien évidemment le fond de 153 oeuvres égyptiennes du musée Granet.
Dès l’entrée, on est saisi par l’ambiance particulièrement feutrée due aux couleurs choisies pour les murs, comme le rouge ou le bleu.

Colosse de Pharaon debout.
Photo:(c) Sylvie Maugis
Installation du Colosse. Photo: (c) Musée Granet.

Des objets, des sculptures, des fragments, des bas reliefs, des bijoux, des stèles, des papyrus nous surprennent et nous séduisent dans les trois cent mètres carrés de magnifiques salles.
J’ai été particulièrement fascinée par les momies d’animaux (varan, poissons, chats..) les petites sculptures d’Isis allaitant, le visage d’une grande douceur d’une statue et surtout ce sarcophage ouvert qui, par un jeu de miroir et d’éclairage très subtil nous permet de voir les deux faces de ce sarcophage peint et la momie à l’intérieur ( pour l’anecdote: la momie n’est pas celle d’origine. En effet il s’agit d’un sarcophage d’homme et d’une momie de femme!)

PODCAST
Écoutons Bruno ELY nous parler des momies:

La momie de Varan
Cercueil intérieur de Ptahirdis et momie. Photos: (c) Sylvie Maugis

La thématique de l’écriture prend également une large place avec la présentation exceptionnelle de fac-similés de papyrus, et un rappel de l’incroyable histoire du déchiffrement des hiéroglyphes, grâce à la pierre de Rosette, stèle écrite en trois langues – dont les hiéroglyphes – qui a permis à Champollion de percer le mystère de cette écriture.

Entrée de la section « écriture ». La pierre de Rosette. Photo:(c) Sylvie Maugis

Frise des Dieux dans l’un des espaces enfants. Photo: (c) Sylvie Maugis.

Des propositions multimédias et interactives vous permettront de connaître les étapes de la restauration, de voir des radiographies de momies etc.
Et les enfants pourront s’éclater dans les ateliers qui leur sont destinés et même jouer à « Assassin’s Creed »!

Radiographie et espace tactile. Photo: (c) Sylvie Maugis.

PODCAST
Voilà… J’arrive à la fin de l’exposition… Avant de quitter ce lieu magique, retrouvons Bruno ELY et une très savoureuse anecdote sur la vie des dieux et des déesses…


Pour terminer, la vraie bonne idée de l’équipe du musée est de nous faire sortir en empruntant un trajet à travers les autres salles des collections permanentes !
Je suis saisie par la salle Giacometti et par le Soulages mis en dépôt par un collectionneur qui déménage… Charmée aussi par la gentillesse du personnel , prêt à échanger et à communiquer sa passion!

Pierre Soulages et…
Giacometti…

Je ne peux que vous conseiller de suivre une visite guidée pour apprécier au mieux cette remarquable exposition! Et de visiter le site du Musée pour accéder à toutes les animations qui jalonneront l’été:

www.museegranet-aixenprovence.fr

DU 22 JUIN AU 10 OCT. 2021

GIACOMETTI ET

L’ÉGYPTE ANTIQUE À

L’INSTITUT GIACOMETTI

5 rue Victor Schoelcher 75014 Paris

Une visite virtuelle des Collections Égyptiennes du Louvre:
https://www.louvre.fr/decouvrir/les-parcours-de-visite/escale-au-bord-du-nil

Visage de la statue du boucher. Musée GRANET.
Photo: (c) Sylvie Maugis.

AU FIL DE L’ART…

… TISSER LA NATURE

Après la très belle exposition « Tisser la couleur » en 2015, Le Musée de Lodève propose:
« TISSER LA NATURE XVe – XXIe siècle »

Une exposition, plusieurs lieux:
L’exposition « Tisser la nature XVe – XXIe siècle » a été imaginée par le réseau TRAME[S] qui regroupe cinq établissements liés à l’art tissé : le Musée de Lodève, la Cité Internationale de la Tapisserie, l’abbaye de La Chaise-Dieu, le musée Dom Robert, et l’atelier-musée Jean Lurçat.
Chaque lieu présente des tapisseries différentes, toutes portent sur le même thème : Tisser la nature.

Affiche expo « Tisser la couleur » 2015
Affiche expo « Tisser la nature » 2021

Une tradition lodèvoise…

Lodève perpétue ainsi la tradition locale et centenaire de la tapisserie, mise en valeur par sa Manufacture Nationale de la Savonnerie, installée à Lodève depuis 1964:


Le parcours de l’exposition « TISSER LA NATURE »:

Cet « herbier géant » se compose de 12 tapisseries et d’un tapis du XX° et XXI° siècle ainsi que de huit tapisseries du XVI° au XIX° siècle. (Le tapis « la grande feuille » a été réalisé dans l’atelier de la Savonnerie de Lodève.)
Nous pouvons ainsi apprécier comment la tapisserie actuelle s’inspire des thèmes plus anciens.
Le traitement du végétal a constitué un élément majeur de l’esthétique de la tapisserie à toutes les époques: des « mille fleurs » du XV° siècle, ces tapisseries dont la multitude de petites fleurs parsème le fond, en passant par la Renaissance puis les tentures aux scènes galantes ou champêtres du XVIII°, jusqu’à l’abstraction récente où le végétal fait exploser l’imaginaire.
À l’origine les tapisseries avaient pour mission de couvrir les murs et isoler du froid. Les grandes pièces étaient également fort sombres et les sujets végétaux apportaient de la gaieté et de la beauté dans ces châteaux un peu austères !
De nos jours, les artistes sont sensibilisés aux questions environnementales et leurs représentations de la nature trouvent place dans leurs oeuvres.

« Les bergers » vers 1500. Photo Sylvie Maugis
Détail
« L’école buissonnière » de Dom Robert. 1997.
Photo: (c) musée Dom Robert

Métier de haute lisse…

Un peu de technique….

Pour réaliser une tapisserie, il faut d’abord un modèle.
Il s’agit d’un dessin ou d’une peinture qui donne les éléments principaux de la composition. 
Cette première maquette est ensuite agrandie aux dimensions souhaitées de la future tapisserie. C’est ce document, appelé carton, qui va guider le lissier pour l’exécution de la tapisserie. Si le modèle est souvent l’œuvre d’un artiste célèbre, la réalisation du carton est confiée à des artisans spécialisés dans cette tâche. Par souci d’économie, il est fréquent que les lissiers réutilisent d’anciens cartons qu’ils assemblent et modifient pour former de nouvelles compositions.  

Le tissage de la tapisserie:
La tapisserie résulte de l’entrecroisement de fils de trame colorés sur une armature en fils de chaîne
Il existe deux types de métiers à tapisserie : le métier dit de haute lisse, vertical, et le métier de basse lisse, horizontal.
Dans les deux cas, le principe est le même : d’abord, le lissier tend des fils de chaîne entre deux rouleaux, appelés ensouples. Puis, à l’aide de navettes ou de flutes, il passe les fils de trame colorés, entre les fils de chaîne pairs et impairs. À l’aide d’un peigne, il tasse les fils de trame de façon à couvrir totalement l’armature de fils de chaîne. Un tissage fin et serré est signe de qualité.  
Contrairement au tissage de draps où l’artisan travaille par ligne complète, le lissier réalise sa tapisserie motif par motif.
Pour cela, il se guide du carton, qui est placé sous le métier dans le cas de la basse-lisse et derrière lui dans le cas de la haute-lisse. Quelle que soit la technique, le lissier œuvre sur le revers de la tapisserie et ne voit donc pas le motif dans son ensemble. Pour contrôler la qualité de son travail, il s’aide d’un miroir.  
L’exécution d’une tapisserie exige souvent plusieurs années et mobilise plusieurs lissiers simultanément. On estime que la réalisation d’un mètre carré de tapisserie peut nécessiter entre un et dix mois de travail selon la technique et la finesse du tissage.
Une fois la réalisation terminée, on détache la pièce du métier, c’est ce qu’on appelle le « tombé de métier » qui marque l’achèvement de la tapisserie

Les gestes sur un métier de basse lisse
Photo: Isabelle Bideau (c) Coll. du Mobilier National


Parfois, le Maître Lissier (ou Licier) – qui supervise le travail des lissiers et lissières – signe la réalisation de la tapisserie, c’est pourquoi vous pouvez voir dans un coin de la tapisserie des initiales différentes de la signature de l’artiste peintre, parfois accolée à celle du peintre, parfois dans le coin opposé:

Quelques signatures de lissiers au musée de Lodève

Revenons à Lodève…

Enfin du monde dans un musée 🙂
Photo: (c) Sylvie Maugis

Au musée de Lodève le travail en direction du jeune public tient une grande place et les propositions fourmillent d’inventivité!
Jeux, panneaux explicatifs ludiques permettent aux enfants, et leurs accompagnateurs également, de mieux comprendre et apprécier les subtilités des oeuvres présentées.

« Jardin bleu » Etienne Hajdu. 1988.
Photo: (c) Sylvie Maugis
Panneau accolé à « Jardin Bleu ».
Jean Lurçat . 1962. « Les loups dans la Bergerie »
Détail. Photo: (c) Sylvie Maugis
Pour les enfants…
Jeu de Mots croisés à partir du tapis « Grande Feuille » d’Etienne Hajdu. 1994


Et peut-être que, dans quelques années, ces enfants auront envie de devenir lissier.e… Une formation passionnante pour un beau métier d’avenir!

Exposition « TISSER LA NATURE »
Dès la réouverture nationale, probablement le 19 mai…
10h/18h sauf les lundis

Musée de Lodève
Square Georges Auric
34700 LODEVE
0467888610
www.museedelodeve.fr

« TISSER LA NATURE » DANS LES AUTRES LIEUX DU RÉSEAU
TRAME(S) TAPISSERIES EN MASSIF CENTRAL:

TRAME(S) Réseau de sites de tapisseries en Massif Central

Catalogue de l’exposition « TISSER LA NATURE »
commun aux cinq sites



« RONGER SON FREIN… »

« Ronger son frein »: contenir avec peine son impatience ; être dépité ; être contraint de retenir sa colère ; s’impatienter ; supporter avec peine l’inactivité ; contenir son impatience ; contenir sa colère ; retenir sa colère ; refouler en soi son dépit ; mâcher le mors…
Imaginez que vous ne puissiez exprimer votre colère… Alors quoi de mieux que de descendre de votre voiture, installer le cric, démonter une roue et vous mettre à ronger, au choix, un disque, une plaquette ou un tambour ? Une chose est sûre, en vous occupant ainsi, vous devez certainement vous calmer. Et faire plaisir à votre dentiste…
Mais cette expression datant de la fin du XIVe siècle, ce n’est pas aux véhicules motorisés qu’il faut penser, mais à la plus belle conquête de l’homme :  le cheval.
En effet, le ‘frein’ est ici le mors, cette pièce généralement métallique placée dans la bouche de l’animal et qui, reliée aux rênes, sert à le diriger.
Or, que fait un cheval qui s’impatiente en attendant le retour de son maître? il mâchouille son mors (son frein), faute de choses plus intéressantes à faire.
Dans cette métaphore, le ‘frein’ c’est ce qui bloque l’élan de celui qui aimerait bien exprimer ses sentiments. Et ‘ronger’ est associé à cette énergie contenue qui devient corrosive et mine l’intérieur. 
Cette expression pouvait aussi vouloir dire « être condamné à l’ennui », mais elle est très peu utilisée avec ce sens. Pourtant, on peut imaginer que le pauvre cheval qui attend trompe son ennui en « rongeant son frein ». 

Voilà un peu l’état dans lequel vous me trouvez aujourd’hui!
Je piaffe d’impatience, les oreilles tournées vers les déclarations sanitaires et les oeillères rivées sur les chiffres de la pandémie… La fumée me sort des naseaux quand je vois tous ces gens porter le masque sous le nez, voire pas du tout et je rue dans les brancards en pensant aux soignant.es éreinté.es qui doivent assumer l’imbécilité de tous ceux et celles qui ne pensent qu’à leur pauvre petite personne…

Attendre…

Et décider de s’en amuser!

Comme on ne peut plus entrer dans les musées, regardons les autres le faire! Voilà deux fictions très différentes:

« LA NUIT AU MUSÉE »
Fiction de Shawn Lévy, film de 2006, qui raconte les déboires d’un gardien de musée, la nuit…
Vous y retrouverez – entre autres – Ben Stiller, Robin Williams, Dick Van Dycke ( le petit ramoneur de  » Mary Poppins)
https://www.youtube.com/watch?v=fY8F6Ymg2B8

« BELPHEGOR »
Série française de 1965, en 4 épisodes de 70 mn, écrite et réalisée par Claude Barma (« Les cinq dernières minutes ») avec Juliette Gréco, Yves Rénier etc.
Un bijou de la télévision de l’époque, filmé avec finesse et où l’on sent que les comédien.ne.s prenaient un grand plaisir dans ce partage d’une intrigue tout à fait étonnante…
J’étais môme quand on regardait ça sur le poste familial, mais je ressens encore les petits frissons et j’entends mon père me rassurer:  » N’aies pas peur, c’est du cinéma! »
AllezÀ-musée vous... 🙂

VISITES VIRTUELLES…

À bientôt et… Restons prudent.e.s !

LES PEINTURES MURALES DANS L’ART ROMAN

« Ange du jugement dernier ». Abbaye Sant’ Angelo in Formis. Capoue

Les représentations médiévales illustrent et enseignent les dogmes essentiels de l’Église et de la Bible.
Au Moyen Âge, l’ensemble de la société est chrétienne. Cela signifie que ces croyants reconnaissent que Jésus est le fils de Dieu, qu’il est mort sur la croix et ressuscité pour assurer le salut de l’humanité. Le livre de l’Apocalypse (dernier livre du Nouveau Testament) est une source d’inspiration majeure. De nombreux Christs en gloire célèbrent la victoire du bien sur le mal.
Seule une part minime de la population médiévale dispose de capacités de lecture. L’accès à l’éducation est limité aux élites, même si l’Église et certains souverains se préoccupent de l’instruction du peuple.
L’une des fonctions des scènes religieuses, commandées par les clercs, est donc pédagogique : il s’agit d’initier les fidèles aux mystères de la religion, de les instruire et de les amener à méditer sur ces modèles de piété. Elles matérialisent la liturgie et le divin. Mais si l’art a pour mission d’enseigner, il ne se refuse pas d’émouvoir, et si l’art roman est un art de symboles, c’est aussi un art humain. Aussi, ces peintures murales sont représentatives de l’univers mental et culturel de la population de l’âge roman.
Dans beaucoup d’édifices, on note une influence byzantine à travers le hiératisme des figures, l’allongement des corps et les costumes.
Dans les peintures murales, les couleurs utilisées relèvent de la gamme des ocres rouges et jaunes et des verts. L’usage du bleu, pigment plus rare et plus coûteux, est souvent réservé aux vêtements de Jésus ( le Christ) et Marie (sa mère) .

Quand on parle des peintures de l’époque romane, on emploie souvent le mot: « fresques »…
Mais ce n’est pas tout à fait correct!
Pour faire simple: les fresques sont des peintures délayées à l’eau, qui se font très rapidement sur un enduit frais ( on dit « a fresco ») alors que la peinture murale sera réalisée sur un enduit sec ( on dit « a secco »).

Un bel exemple de fresques romanes:
la chapelle des Moines de Berzé la Ville

La chapelle Saint-Pierre de Montbazin dans

l’Hérault.

Carte postale représentant la Chapelle St Pierre.

C’est par un dimanche pluvieux et froid, comme seul l’Hérault en a le secret, que j’ai eu le privilège de pouvoir admirer les peintures murales de la Chapelle Saint-Pierre de Montbazin dans l’Hérault.

Intérieur de la chapelle St Pierre de Montbazin.
Photo : (c) Sylvie Maugis
Les peintures murales de la Chapelle St Pierre de Montbazin.
Photo: CRPM

J’ai été accueillie par Daniel Beauron, Président du « Cercle de Recherches du Patrimoine Montbazinois » (CRPM) et Marie-Antoinette Fisher, adjointe au Maire de Montbazin, chargée du Patrimoine, que vous pourrez écouter tous deux en podcast à la fin de la page.

Dans cette très belle chapelle, tout est là pour porter à la sérénité: les proportions « magiques » de cet édifice, les pierres d’une étonnante qualité, une luminosité feutrée et ces peintures murales rares, représentant le Christ et les douze apôtres
Enfin … Seulement 10 apôtres, car un architecte de génie du XV° siècle a ouvert une fenêtre à l’emplacement de deux peintures d’apôtres!
Comme s’il avait joué aux quilles: « Allez tiens! Deux de moinsss!  »
Bon…

On se dira qu’il ne l’a pas fait exprès le bougre, car peut-être n’étaient-elles pas visibles à ce moment là! Mais quand même… Ça fait mal!

L’ouverture pratiquée sur les fresques.
Vitrail contemporain de Claude BAILLON.

Photo: (c) Christian Avenel.

« Une vaste composition se déployait à l’origine sur les cinq pans de la voûte. Les douze apôtres y étaient représentés debout, imberbes, nimbés et drapés à l’antique, leurs mains présentant une taille démesurée. Tenant d’une main un rouleau ou un livre, ils semblent désigner de l’autre le Christ en majesté, inscrit dans une mandorle (ovale) et dont seule la sinopie (dessin avec pigment rouge) est encore visible dans le panneau central.
Tous sont de grande taille (1.90 m environ) ; les traits sont vigoureusement dessinés : visages ronds, nez busqués, lèvres charnues, sourcils jointifs sur le front au-dessus d’yeux globuleux. Leurs positions sont différentes, chaque port de tête a une inclinaison différente. Vêtus de longues tuniques et d’amples manteaux dont les plis sont soulignés par des traits noirs, ils se détachent sur un fond blanc, traités dans une palette réduite : ocre jaune, ocre rouge et brun. Côté Nord, les six apôtres sont relativement bien conservés ; côté Sud, un seul subsiste car une partie de ce décor a été détruite au XVe siècle lors de l’ouverture d’une large fenêtre dans la voûte sud de l’abside.
Ces fresques romanes sont d’autant plus précieuses qu’il s’agit de l’unique exemple, en bas Languedoc, d’une peinture murale dont les couleurs ocre jaunes, bistre et brun ne soient pas totalement délavées.
Un expert a reconnu dans ces personnages les caractéristiques des icônes byzantines.
Ce modèle oriental pourrait avoir transité par l’Italie et avoir été peint à Montbazin par un artiste toscan. »
Extrait du bulletin du CRPM.

Détail d’un apôtre, côté sud.
Photo: (c) Christian Avenel
Cinq apôtres. Photo:(c) Christian Avenel

PODCASTS

Interview de Marie-Antoinette FISHER
Adjointe au Maire de Montbazin, déléguée au Patrimoine.

Interview de Daniel BEAURON,
Président du Cercle de Recherche du Patrimoine Montbazinois

Sources documentaires:

https://www.citedelarchitecture.fr/sites/default/files/documents/2017-04/dossier-pedagogique_les-peintures-murales.pdf

« La peinture romane » de J. Pichard. Edtions Rencontre / Lausanne.

LA BASILIQUE SAINT-SERNIN à TOULOUSE

Partie du toit de la basilique St-Sernin à Toulouse.
Photo: (c) Sylvie Maugis

« L’église Saint-Sernin illumine le soir
d’une fleur de corail que le soleil arrose… »
Claude Nougaro.

Basilique Saint-Sernin la nuit. Toulouse

Bien qu’installée en Occitanie depuis plus de vingt ans, j’avoue que je ne connaissais Toulouse et la basilique Saint-Sernin qu’à travers les paroles de « Toulouse », la chanson de Claude Nougaro…
La météo promet un beau soleil ce week-end, alors partons à la découverte de ce « joyau de l’Art Roman », comme se plaisent à écrire les guides et les fascicules!

Basilique St Sernin. Photo: (c) Sylvie Maugis
Basilique Saint Sernin. Photo: (c) Christian Avenel

À l’âge de 14 ans, mes parents m’emmenèrent visiter la basilique romane de Vézelay, en Bourgogne, et depuis, j’ai toujours été fascinée par cette époque de l’histoire de l’Architecture… D’ailleurs, je ne peux pas m’empêcher de faire un détour pour revoir Vézelay, pour peu que je passe à moins de 100 km!
Est-ce la simplicité des formes et des représentations peintes qui pose un voile de quiétude sur ces édifices? Les proportions majestueuses qui portent le regard au-delà des allées de colonnes?
Peut-être un peu de tout cela…

Dès l’entrée dans la basilique Saint-Sernin, ce même calme serein m’enveloppe de nouveau et j’ai presque du mal à faire des photos, tellement j’ai juste envie de m’imprégner de cette étrange ambiance…

Basilique St Sernin
Photos: (c) Sylvie Maugis
Choeur et Transept de la basilique St Sernin. Photo: (c) Sylvie Maugis
Travée dans la basilique St Sernin. Photo: (c) Sylvie Maugis
Intérieur Basilique St Sernin
Photos: (c) Christian Avenel et Sylvie Maugis

L’Art Roman, 1° partie.

En résumé, ce que l’on désigne par « Art Roman » est la période de l’Histoire de l’Art qui se situe entre le XI° et XIII° siècle (au même moment que le Moyen-Âge).
Essentiellement religieux, l’art roman est très riche en inventions, aussi bien dans les petites églises de campagne que dans les cathédrales et les basiliques.
Ce qui caractérise cette période de l’architecture ce sont les arcs « en plein- cintre », c’est à dire semi-circulaires.
Cette particularité joue un rôle primordial: la sobriété des formes géométriques, apaisantes pour l’oeil et l’esprit, porteraient à la méditation et à l’élévation de l’âme…
N’oublions pas que les édifices religieux avaient pour buts d’honorer Dieu et d’y conduire les fidèles!
À Vézelay, un jour, j’ai assisté à une « prise de voile » (Cérémonie pour des jeunes-filles qui décident d’entrer au couvent comme religieuses) … L’ambiance épurée de la basilique ajoutée à toutes ces jeunes filles face contre terre et la musique de l’orgue… Et bien ça secoue, même un.e athée!

Un arc en plein cintre

Les bâtiments religieux romans ont la forme d’une croix latine et les voûtes sont en pierre au lieu d’être en bois.
La basilique Saint-Sernin de Toulouse est la plus grande basilique romane de France, voire d’Occident, elle mesure 110 m de long sur 64 m de large et 20 m de hauteur!

Plan d’un édifice religieux roman
Tympan de la basilique St Sernin. Photo: (c) Sylvie Maugis


Les murs sont recouverts de fresques représentant des histoires de la religion chrétienne et les chapiteaux (le haut) des piliers sont sculptés de scènes bibliques, afin d’enseigner la religion aux fidèles, souvent illétrés, en racontant la Bible de façon simple et accessible à tous.
La basilique St Sernin appartient aux « églises de pèlerinage »: les pèlerins de St Jacques de Compostelle pouvaient circuler dans les doubles travées de chaque côtés, puis dans le déambulatoire situé derrière la Nef centrale, sans perturber les offices.

Chapiteaux à l’entrée de la Basilique St Sernin. Elle en contient plus de 700!
Photo: (c) Christian Avenel
Fresque de la résurrection. Fin du XI° siècle, restaurée en 2019.
Basilique Saint-Sernin . Toulouse
Photo: (c) Sylvie Maugis

Une autre particularité de cette basilique est le nombre impressionnant de reliques qu’elle contient! Il paraîtrait qu’il y en a plus qu’au Vatican, bien que beaucoup d’elles aient disparu à la Révolution…
Tous ces morceaux d’os ou de tissus reposent dans des ouvrages en orfèvrerie qui sont regroupés dans la crypte, au sous-sol.

Descente vers la crypte de St Sernin.
Photo: (c) Sylvie Maugis
Reliquaire. Photo: (c) Sylvie Maugis

Le jour où j’ai visité Saint-Sernin, l’organiste était venu répéter.
MA-GNI-FI-QUE!
S’asseoir et fermer les yeux pour savourer cet étonnant moment…

Les grandes orgues de la basilique St Sernin. Photo: (c) Christian Avenel

Et comment résister au plaisir d’écouter « Toulouse » de Claude Nougaro, une belle mise en images…

Quelques édifices romans remarquables:

Cathédrale Saint-Lazare d’Autun, abbaye Saint-Philibert de Tournus, abbaye de Cluny, basilique de Paray-le-Monial, abbaye Sainte-Marie-Madeleine de Vézelay, basilique Saint-Andoche de Saulieu, abbaye de Cîteaux, abbaye de Fontenay, abbaye de Saint-Bénigne, abbaye de Charlieu.

Vient de sortir…